LA CONTRE-PUCE DE RAPIN.
Puceque tant de bons esprisPour sujet de leurs vers ont pris,Qui t'ont trouvée si habileQue, la Muse les échaufant,Ils t'ont fait un grand Elefant,Par leur invention gentille,Tu as eu cet heur aux Grans jours,Aussi c'est volontiers tousjoursLe temps que tu te fais conoistre,Quand le Soleil plus haut monté,Des moites chaleurs de l'estéDans la poussiere te fait naistre.Mais s'il se falloit amuserA la verité deguiserD'une flateuse couverture,J'aymerois mieux chanter le poux,Qui s'engendre et se paist de nouxPlus amy de nostre nature.Je dirois la punaise aussi,Et le morpion racoursi,Qui s'attache à nostre substance;Mais je ne sceu jamais traiterUn sujet où il faut vanterLe mal contre la conscience.Ceux qui t'elevent jusqu'aux cieuxToutesfois ne t'ayment pas mieuxQue moy qui te blasme et despite;Et quand visiter les voudras,Ils te chasseront de leurs dras,Pour belle qu'ils t'ont descrite.Encor dit-on que l'argumentOù ils ont pris le fondementDe te louer par artificeMeritoit mieux d'estre vangé,Et à ces Grans jours corrigéPar les voyes de la Justice.On conte que, de guet à pendPeu à peu glissant et rampant,Du bas où tu fais ta retraiteTu t'estois perchée en un lieuDuquel Prince ni demidieuN'aproche la main indiscrette.Entre deux tertres arrondisTu acrochois tes pieds hardisAu fonds d'une campagne belle,Et apres mille petits sautsEt mille cauteleux assauts,Tu osois poindre une pucelle.Ainsi que dans un large estang,A plain gosier tu beus son sang,Et pour reste de ton audace,Comme les taons veneneux font,Tu fis encor d'un pourpre rondMarqueter et rougir la place.Pour une telle cruauté,Puce, tu avois meritéQu'entre deux presses cristallinesOn te fit le ventre crever,Qui s'estoit osé abreuverDe belles liqueurs nectarines.L'assassinat qualifié,Par deux tesmoins verifié,Te convainquoit d'estre coulpable;Mais ceux qui te devoient punirLes premiers osent maintenirQue ton fait estoit excusable.He! sangsue du cors humain,Les deux premiers doits de la mainComme sergens te devoient prendre,De salive un peu preparez,Et les deux pouces acerezPar beau millieu te devoient fendre.Le Prince fort bien ordonnaQui un gros salaire donnaAu page qui t'avoit surpriseDessus sa robe sautelant,Et secrettement te coulantDans le colet de sa chemise.Mais il trompa l'espoir de ceuxQui prirent le poux paresseux,S'atendans à plus grosse somme:Car, comme il respondit, tu viensDe la sale ordure des chiens,Et le poux ne vient que de l'homme.On conte que quand JupiterSe voulut un jour despiterContre ses fermiers de la terre,Au lieu où son foudre arrivaMille vermines on trouvaFuture domestique guerre.Les taons, les guespes, les cheussons,Qui ont des plus picquans fissons,Et les Aragnes y nasquirent,Les punaises, les morpions,Les souris et les scorpionsAupres de toy, Puce, en sortirent.Mais entre tous ces animauxQui sont nos plus familiers maux,Puce, tu nous fais plus de peine:Les autres sont pris aisément,Et tu as un fretillementQui empesche qu'on ne te prenne.L'ennemy plus lourd et pesant,Encores qu'il soit malfaisant,Et toutesfois est moins à craindre:A toute heure on le peut domter;Mais on doit celuy redouterQui est plus difficile à joindre.Tu nous fais éblouir les yeuxTe remuant en divers lieux,Tant tu és agile et rusee:La main qui te pense écacherTe tournoyant dessus la chairBien souvent se trouve abusée.La Pucelle, qui ne sçait pasLes lieux où tu prens tes repas,S'y trompe une serée entiere:La vieille ne fait que jouër,T'attendant à l'abreuvoërOù elle dresse sa panthiere.Quantefois j'ay veu, au matin,De ma maistresse le tetinPicoté de tes noires traces!Et si là j'en voyois l'effet,Dieu sçait si tu n'avois point faitEncores pis en d'autres places.Ceux qui t'ont fait par fictionEstre la fille d'OrionOnt bien trouvé ton origine:Car Orion est un pisseur,Et tu nais de l'orde espesseurQui se detrampe avec l'urine.Puis ce qu'on faint que Pan t'aymaQuand Jupiter te transformaEn cette petitesse noire,Si Pan n'estoit qu'un vieil bouquin,Salle et ord, puant et faquin,Celà n'est pas fascheux à croire.Quant à moy, je ne te crains rien,Car Dieu mercy j'ay le moyenD'eviter ta salle morsure:Je me sçay tenir nettementAu linge et en l'accoustrement,C'est la recepte la plus seure.La chambre souvent balloyer,Le haut et le bas nettoyer,S'esloigner de tous lieux infames,Est le moyen de s'exempterDe toy, qui ne veut adjouterNe coucher point avec les femmes.Et quand cela je n'aurois point,Encores sçay-je un autre pointPour brider ta gueule alterée:Dés le soir je m'enyvreray,Et toute la nuit dormiraySans sentir ta pointe acerée.
Puceque tant de bons esprisPour sujet de leurs vers ont pris,Qui t'ont trouvée si habileQue, la Muse les échaufant,Ils t'ont fait un grand Elefant,Par leur invention gentille,
Tu as eu cet heur aux Grans jours,Aussi c'est volontiers tousjoursLe temps que tu te fais conoistre,Quand le Soleil plus haut monté,Des moites chaleurs de l'estéDans la poussiere te fait naistre.
Mais s'il se falloit amuserA la verité deguiserD'une flateuse couverture,J'aymerois mieux chanter le poux,Qui s'engendre et se paist de nouxPlus amy de nostre nature.
Je dirois la punaise aussi,Et le morpion racoursi,Qui s'attache à nostre substance;Mais je ne sceu jamais traiterUn sujet où il faut vanterLe mal contre la conscience.
Ceux qui t'elevent jusqu'aux cieuxToutesfois ne t'ayment pas mieuxQue moy qui te blasme et despite;Et quand visiter les voudras,Ils te chasseront de leurs dras,Pour belle qu'ils t'ont descrite.
Encor dit-on que l'argumentOù ils ont pris le fondementDe te louer par artificeMeritoit mieux d'estre vangé,Et à ces Grans jours corrigéPar les voyes de la Justice.
On conte que, de guet à pendPeu à peu glissant et rampant,Du bas où tu fais ta retraiteTu t'estois perchée en un lieuDuquel Prince ni demidieuN'aproche la main indiscrette.
Entre deux tertres arrondisTu acrochois tes pieds hardisAu fonds d'une campagne belle,Et apres mille petits sautsEt mille cauteleux assauts,Tu osois poindre une pucelle.
Ainsi que dans un large estang,A plain gosier tu beus son sang,Et pour reste de ton audace,Comme les taons veneneux font,Tu fis encor d'un pourpre rondMarqueter et rougir la place.
Pour une telle cruauté,Puce, tu avois meritéQu'entre deux presses cristallinesOn te fit le ventre crever,Qui s'estoit osé abreuverDe belles liqueurs nectarines.
L'assassinat qualifié,Par deux tesmoins verifié,Te convainquoit d'estre coulpable;Mais ceux qui te devoient punirLes premiers osent maintenirQue ton fait estoit excusable.
He! sangsue du cors humain,Les deux premiers doits de la mainComme sergens te devoient prendre,De salive un peu preparez,Et les deux pouces acerezPar beau millieu te devoient fendre.
Le Prince fort bien ordonnaQui un gros salaire donnaAu page qui t'avoit surpriseDessus sa robe sautelant,Et secrettement te coulantDans le colet de sa chemise.
Mais il trompa l'espoir de ceuxQui prirent le poux paresseux,S'atendans à plus grosse somme:Car, comme il respondit, tu viensDe la sale ordure des chiens,Et le poux ne vient que de l'homme.
On conte que quand JupiterSe voulut un jour despiterContre ses fermiers de la terre,Au lieu où son foudre arrivaMille vermines on trouvaFuture domestique guerre.
Les taons, les guespes, les cheussons,Qui ont des plus picquans fissons,Et les Aragnes y nasquirent,Les punaises, les morpions,Les souris et les scorpionsAupres de toy, Puce, en sortirent.
Mais entre tous ces animauxQui sont nos plus familiers maux,Puce, tu nous fais plus de peine:Les autres sont pris aisément,Et tu as un fretillementQui empesche qu'on ne te prenne.
L'ennemy plus lourd et pesant,Encores qu'il soit malfaisant,Et toutesfois est moins à craindre:A toute heure on le peut domter;Mais on doit celuy redouterQui est plus difficile à joindre.
Tu nous fais éblouir les yeuxTe remuant en divers lieux,Tant tu és agile et rusee:La main qui te pense écacherTe tournoyant dessus la chairBien souvent se trouve abusée.
La Pucelle, qui ne sçait pasLes lieux où tu prens tes repas,S'y trompe une serée entiere:La vieille ne fait que jouër,T'attendant à l'abreuvoërOù elle dresse sa panthiere.
Quantefois j'ay veu, au matin,De ma maistresse le tetinPicoté de tes noires traces!Et si là j'en voyois l'effet,Dieu sçait si tu n'avois point faitEncores pis en d'autres places.
Ceux qui t'ont fait par fictionEstre la fille d'OrionOnt bien trouvé ton origine:Car Orion est un pisseur,Et tu nais de l'orde espesseurQui se detrampe avec l'urine.
Puis ce qu'on faint que Pan t'aymaQuand Jupiter te transformaEn cette petitesse noire,Si Pan n'estoit qu'un vieil bouquin,Salle et ord, puant et faquin,Celà n'est pas fascheux à croire.
Quant à moy, je ne te crains rien,Car Dieu mercy j'ay le moyenD'eviter ta salle morsure:Je me sçay tenir nettementAu linge et en l'accoustrement,C'est la recepte la plus seure.
La chambre souvent balloyer,Le haut et le bas nettoyer,S'esloigner de tous lieux infames,Est le moyen de s'exempterDe toy, qui ne veut adjouterNe coucher point avec les femmes.
Et quand cela je n'aurois point,Encores sçay-je un autre pointPour brider ta gueule alterée:Dés le soir je m'enyvreray,Et toute la nuit dormiraySans sentir ta pointe acerée.