«Octobre 1645.«Madame, j'ai tant de motifs de rechercher les occasions de vous servir, qu'il ne s'en présentera jamais dont je ne profite avec joie, et je ne vous saurois être plus sensiblement obligé que de me donner lieu, en m'honorant de vos commandements, de vous rendre des preuves de cette vérité. Cependant, Madame, vous me permettrez un peu de me plaindre de la créance que vous avez eue qu'il fût besoin d'une recharge pour me faire ressouvenir des intérêts de M. Esprit, dans la distribution des bénéfices, après la recommandation que vous m'en aviez faite. Je vous supplie de croire que tout ce qui vient de votre part m'est en trop de vénération pour en faire si peu de cas, et qu'il y aura une impossibilité absolue aux choses que vous désirerez de moi, lorsque je ne vous procurerai pas une entière satisfaction; ne se pouvant rien ajouter au désir que j'ai de mériter par mes services la continuation de l'honneur de votre bienveillance, ni à l'extrême passion avec laquelle je suis, etc.»
«Octobre 1645.
«Madame, j'ai tant de motifs de rechercher les occasions de vous servir, qu'il ne s'en présentera jamais dont je ne profite avec joie, et je ne vous saurois être plus sensiblement obligé que de me donner lieu, en m'honorant de vos commandements, de vous rendre des preuves de cette vérité. Cependant, Madame, vous me permettrez un peu de me plaindre de la créance que vous avez eue qu'il fût besoin d'une recharge pour me faire ressouvenir des intérêts de M. Esprit, dans la distribution des bénéfices, après la recommandation que vous m'en aviez faite. Je vous supplie de croire que tout ce qui vient de votre part m'est en trop de vénération pour en faire si peu de cas, et qu'il y aura une impossibilité absolue aux choses que vous désirerez de moi, lorsque je ne vous procurerai pas une entière satisfaction; ne se pouvant rien ajouter au désir que j'ai de mériter par mes services la continuation de l'honneur de votre bienveillance, ni à l'extrême passion avec laquelle je suis, etc.»
Voici encore une assez jolie lettre de Mazarin à Mmede Longueville sur la fin de la grave maladie que son frère, le duc d'Enghien, avait faite après Nortlingen.Ibid., fol. 442:
«19 septembre 1645.«Madame, je profite de l'occasion de M. de la Rallière que la Reinedépêche à M. le Duc, pour me réjouir du recouvrement d'une santé que je puis dire avec vérité ne m'être pas moins chère qu'à vous-même. Je vous avoue que j'ai été un de ceux qui ont aidé à vous tromper en célant sa maladie, mais j'en attends plutôt des remerciements que des reproches, puisque nous avons pris pour nous toutes les peines et les inquiétudes, qui certainement ont été grandes, et nous n'avons voulu partager avec vous que la réjouissance. Je vous proteste, Madame, que la mienne est au dernier point, et que pour me la procurer j'aurois bien gaiement donné une partie de mon sang. C'est ce que j'ai voulu avoir le bien de vous témoigner par ces lignes que je finis par l'excuse que je vous fais qu'elles ne sont pas de ma main; j'entends si peu l'orthographe que vous auriez eu trop de peine à déchiffrer avec quels sentiments de respect et de passion je suis, etc.»
«19 septembre 1645.
«Madame, je profite de l'occasion de M. de la Rallière que la Reinedépêche à M. le Duc, pour me réjouir du recouvrement d'une santé que je puis dire avec vérité ne m'être pas moins chère qu'à vous-même. Je vous avoue que j'ai été un de ceux qui ont aidé à vous tromper en célant sa maladie, mais j'en attends plutôt des remerciements que des reproches, puisque nous avons pris pour nous toutes les peines et les inquiétudes, qui certainement ont été grandes, et nous n'avons voulu partager avec vous que la réjouissance. Je vous proteste, Madame, que la mienne est au dernier point, et que pour me la procurer j'aurois bien gaiement donné une partie de mon sang. C'est ce que j'ai voulu avoir le bien de vous témoigner par ces lignes que je finis par l'excuse que je vous fais qu'elles ne sont pas de ma main; j'entends si peu l'orthographe que vous auriez eu trop de peine à déchiffrer avec quels sentiments de respect et de passion je suis, etc.»
Les deux lettres qui suivent sont adressées à M. le Prince, Henri de Bourbon, IIedu nom. Nous les tenons de Monseigneur le duc d'Aumale, qui a bien voulu les tirer pour nous des archives de la maison de Condé. La première est évidemment de l'automne de 1642, quelques mois après le mariage de Mllede Bourbon avec M. de Longueville, lorsqu'elle eut la petite vérole, et que son mari fut envoyé en Italie pour prendre le commandement de l'armée à la place du duc de Bouillon, arrêté et emprisonné, voyez chap.III. Mmede Longueville, à laquelle son mari écrivait souvent, donnait des nouvelles à son père, M. le Prince, alors éloigné aussi, et qui avait été chargé par le cardinal de Richelieu d'une petite expédition militaire où il ne réussit guère. La seconde lettre se rapporte au déplaisir que M. le Prince ressentit de ce peu de succès.
«De Paris, ce 13enovembre (1642).«Monsieur,«Pour obéir au commandement que vous me fîtes en partant de Paris de vous mander des nouvelles de M. de Longueville, je vous dirai qu'il est arrivé un courrier qui partit le premier de ce mois qui nous a donné beaucoup de joie, nous apprenant que les ennemis, qui avoient été trois ou quatre fois à une portée de mousquet des retranchements, et tout près, à ce que l'on croyoit, de les vouloir attaquer, se sont retirés dans le Milanais, et ont laissé tous les passages, par lesquels les vivres et les munitions devoient venir, entièrement libres, de sorte qu'on ne doute plus de la prise de Tortose. La mine n'avoit pas encorejoué, comme l'on nous l'avoit dit, mais ce devoit être bientôt. J'attends avec une extrême impatience le succès de cette affaire, espérant avec toute sorte d'apparence qu'il sera tel que nous le demandons à Dieu. Je ne manquerai pas, Monsieur, de vous rendre compte de tout ce que j'apprendrai, ainsi que vous me l'avez ordonné, n'ayant point de plus forte passion que celle de vous témoigner par ma très humble obéissance combien je suis, Monsieur, votre très humble et très obéissante fille et servante,Anne de Bourbon.».«Monsieur,«Je croirois manquer à mon devoir si je ne vous témoignois par cette lettre l'extrême déplaisir que j'ai reçu du mauvais succès que vous avez eu. Ce qui m'en afflige le plus est la crainte que j'ai que vous n'en soyez malade. J'ose vous supplier très humblement de ne vous point affliger, et de croire que je n'ai pas tant ressenti la peine de mon mal que du déplaisir que je sais que vous avez. Je vous rends grâces très humbles de l'honneur que vous m'avez fait de songer à ma maladie avec tant de soin et de bonté. Je suis, Dieu merci, à cette heure, en état de vous rendre tous les services que je vous dois. Je vous supplie très humblement de croire que je ne manquerai jamais à vous témoigner par mes obéissances avec combien de passion et de respect je suis, Monsieur, votre très humble et obéissante fille et servante,Anne de Bourbon/»«Ce 18enovembre.»
«De Paris, ce 13enovembre (1642).
«Monsieur,
«Pour obéir au commandement que vous me fîtes en partant de Paris de vous mander des nouvelles de M. de Longueville, je vous dirai qu'il est arrivé un courrier qui partit le premier de ce mois qui nous a donné beaucoup de joie, nous apprenant que les ennemis, qui avoient été trois ou quatre fois à une portée de mousquet des retranchements, et tout près, à ce que l'on croyoit, de les vouloir attaquer, se sont retirés dans le Milanais, et ont laissé tous les passages, par lesquels les vivres et les munitions devoient venir, entièrement libres, de sorte qu'on ne doute plus de la prise de Tortose. La mine n'avoit pas encorejoué, comme l'on nous l'avoit dit, mais ce devoit être bientôt. J'attends avec une extrême impatience le succès de cette affaire, espérant avec toute sorte d'apparence qu'il sera tel que nous le demandons à Dieu. Je ne manquerai pas, Monsieur, de vous rendre compte de tout ce que j'apprendrai, ainsi que vous me l'avez ordonné, n'ayant point de plus forte passion que celle de vous témoigner par ma très humble obéissance combien je suis, Monsieur, votre très humble et très obéissante fille et servante,
Anne de Bourbon.».
«Monsieur,
«Je croirois manquer à mon devoir si je ne vous témoignois par cette lettre l'extrême déplaisir que j'ai reçu du mauvais succès que vous avez eu. Ce qui m'en afflige le plus est la crainte que j'ai que vous n'en soyez malade. J'ose vous supplier très humblement de ne vous point affliger, et de croire que je n'ai pas tant ressenti la peine de mon mal que du déplaisir que je sais que vous avez. Je vous rends grâces très humbles de l'honneur que vous m'avez fait de songer à ma maladie avec tant de soin et de bonté. Je suis, Dieu merci, à cette heure, en état de vous rendre tous les services que je vous dois. Je vous supplie très humblement de croire que je ne manquerai jamais à vous témoigner par mes obéissances avec combien de passion et de respect je suis, Monsieur, votre très humble et obéissante fille et servante,
Anne de Bourbon/»
«Ce 18enovembre.»
Nous savions que Mmede Longueville et les deux sœurs Louise Marie et Anne de Gonzague, étant parentes, avaient dû se connaître beaucoup, et nous publierons un jour une correspondance intime et très curieuse de Mmede Longueville et de la princesse Anne pendant la Fronde, où toutes deux elles étaient si fort engagées. Ici nous rencontrons la trace d'une relation assez étroite entre Mmede Longueville et la princesse Marie. Celle-ci venait d'être choisie pour être reine de Pologne, grâce à la protection de Mmela Princesse et du duc d'Enghien[624]. Avant son départ, elle avait été passer une partie de l'été de 1645, à Trie, belle terre des Longueville, où elle avait appris la bataille et la victoire de Nortlingen. Elle s'était empressée d'en écrire une lettrede félicitation à la sœur du victorieux, alors à Paris. Voici la réponse de Mmede Longueville, que nous devons encore à la gracieuse bienveillance de Monseigneur le duc d'Aumale:
«A Madame la princesse Marie.«Du 23eaoût 1645.«Je vous suis très redevable de la bonté que vous avez eue de prendre part à la joie que le bonheur de Monsieur mon frère m'a donnée. C'est une marque très obligeante de l'honneur que vous me faites de m'aimer, que je n'ai point de paroles pour vous exprimer le ressentiment que j'en ai. Je crois que vous ne doutez pas de ma reconnoissance là-dessus; c'est pourquoi j'en quitterai le discours pour vous donner des nouvelles de M. le maréchal de Gramont, comme vous me l'ordonnez. Je vous dirai donc qu'il est prisonnier[625], mais pas blessé, à ce que l'on m'a assuré. On espère que sa prison ne sera pas longue. Car nous avons pris le général Glen[626], contre lequel on croit qu'on l'échangera promptement, les ennemis ayant grand besoin d'un homme de commandement parmi eux, et ayant perdu par la mort de Mercy et par la prison de celui-ci tous les plus considérables qu'ils eussent; ce qui fait croire qu'ils ne feront nulle difficulté de rendre M. le maréchal de Gramont contre Glen, que l'on leur devoit offrir tout à l'heure. Voilà tout ce que j'en ai appris. La pauvre MmeMontausier est fort affligée de Pisany[627], à ce que l'on m'a dit. Je suis ravie que Trie vous soit agréable et que le séjour ne vous en soit pas incommode. Je souhaite pourtant de tout mon cœur que vous le quittiez bientôt, afin qu'en vous voyant souvent on puisse profiter du temps qui reste à vous avoir encore ici.»
«A Madame la princesse Marie.
«Du 23eaoût 1645.
«Je vous suis très redevable de la bonté que vous avez eue de prendre part à la joie que le bonheur de Monsieur mon frère m'a donnée. C'est une marque très obligeante de l'honneur que vous me faites de m'aimer, que je n'ai point de paroles pour vous exprimer le ressentiment que j'en ai. Je crois que vous ne doutez pas de ma reconnoissance là-dessus; c'est pourquoi j'en quitterai le discours pour vous donner des nouvelles de M. le maréchal de Gramont, comme vous me l'ordonnez. Je vous dirai donc qu'il est prisonnier[625], mais pas blessé, à ce que l'on m'a assuré. On espère que sa prison ne sera pas longue. Car nous avons pris le général Glen[626], contre lequel on croit qu'on l'échangera promptement, les ennemis ayant grand besoin d'un homme de commandement parmi eux, et ayant perdu par la mort de Mercy et par la prison de celui-ci tous les plus considérables qu'ils eussent; ce qui fait croire qu'ils ne feront nulle difficulté de rendre M. le maréchal de Gramont contre Glen, que l'on leur devoit offrir tout à l'heure. Voilà tout ce que j'en ai appris. La pauvre MmeMontausier est fort affligée de Pisany[627], à ce que l'on m'a dit. Je suis ravie que Trie vous soit agréable et que le séjour ne vous en soit pas incommode. Je souhaite pourtant de tout mon cœur que vous le quittiez bientôt, afin qu'en vous voyant souvent on puisse profiter du temps qui reste à vous avoir encore ici.»
Les Carmélites ne s'étaient pas contentées de faire écrire à la princesse Marie, devenue Reine de Pologne, par Mlled'Épernon, pour obtenir sa protection auprès du Pape dans l'affaire de la béatification de la mère de Saint-Joseph, comme nous l'apprennent les deux lettres de la Reine de Pologne, publiées plus haut, p. 402; elles avaient employé auprès d'elle Mmede Longueville, qui n'avait pas manquéde presser vivement son illustre amie de s'associer à ses démarches, et lui avait même adressé un modèle des lettres qu'elle devait écrire à son ambassadeur à Rome et au Saint-Père[628].
«A la Reine de Pologne et de Suède.«De Paris, ce 17eoctobre (1647[629]).«Mon accouchement m'a empêchée de témoigner plus tôt à Votre Majesté la part que j'ai prise au déplaisir qu'elle a reçu de la perte du prince son beau-fils, et voici la première lettre que j'ai été en état d'écrire depuis ce temps, qui me servira aussi, Madame, à faire une très humble supplication à Votre Majesté, qui est de vouloir écrire au Pape et à l'ambassadeur de V. M. en faveur de la béatification de la bienheureuse mère Madeleine, que V. M. a connue au grand couvent des Carmélites de Paris. Je lui envoie la teneur des lettres qu'elles lui demandent, et la supplie très humblement, si elle leur accorde cette grâce, de me les envoyer quand V. M. les aura écrites, afin que je les envoie à celui qui est chargé de cette affaire, qui les rendra à l'ambassadeur de V. M. quand il sera temps d'agir pour la faire réussir. Et comme il y a dans la lettre que V. M. doit écrire à son ambassadeur de faire constituer des procureurs, ce n'est que pour fortifier la chose; car on ne prétend point obliger V. M. à aucun soin ni à aucune dépense, les Carmélites du grand couvent se chargeant de l'un et de l'autre. Le Roy, la Reine et la Reine d'Angleterre leur ont fait le même honneur que je vous demande pour elles, et duquel j'aurai une obligation très sensible à V. M., que je supplie, avec tous les respects que je lui dois, de me conserver quelque petite place dans son cœur, et de me croire sa très obéissante et très passionnée servante,Anne de Bourbon.»«Le pauvre La Feuillade a été tué. Je crois que V. M. en sera fâchée.»
«A la Reine de Pologne et de Suède.
«De Paris, ce 17eoctobre (1647[629]).
«Mon accouchement m'a empêchée de témoigner plus tôt à Votre Majesté la part que j'ai prise au déplaisir qu'elle a reçu de la perte du prince son beau-fils, et voici la première lettre que j'ai été en état d'écrire depuis ce temps, qui me servira aussi, Madame, à faire une très humble supplication à Votre Majesté, qui est de vouloir écrire au Pape et à l'ambassadeur de V. M. en faveur de la béatification de la bienheureuse mère Madeleine, que V. M. a connue au grand couvent des Carmélites de Paris. Je lui envoie la teneur des lettres qu'elles lui demandent, et la supplie très humblement, si elle leur accorde cette grâce, de me les envoyer quand V. M. les aura écrites, afin que je les envoie à celui qui est chargé de cette affaire, qui les rendra à l'ambassadeur de V. M. quand il sera temps d'agir pour la faire réussir. Et comme il y a dans la lettre que V. M. doit écrire à son ambassadeur de faire constituer des procureurs, ce n'est que pour fortifier la chose; car on ne prétend point obliger V. M. à aucun soin ni à aucune dépense, les Carmélites du grand couvent se chargeant de l'un et de l'autre. Le Roy, la Reine et la Reine d'Angleterre leur ont fait le même honneur que je vous demande pour elles, et duquel j'aurai une obligation très sensible à V. M., que je supplie, avec tous les respects que je lui dois, de me conserver quelque petite place dans son cœur, et de me croire sa très obéissante et très passionnée servante,
Anne de Bourbon.»
«Le pauvre La Feuillade a été tué. Je crois que V. M. en sera fâchée.»
FIN DE L'APPENDICE.