Chapter 17

"Vous me demandez la réponse que j'ai à y faire. Je vous avoue que je tiens assez peu à ce que l'on nie ou affirme telle ou telle des scènes où j'ai pu être acteur plus ou moins obscur dans notre grande lutte de juillet 1830; mais, puisque vous y tenez,JE DÉCLARE QUELA SCÈNE DE L'HÔTEL DE VILLE EST, sauf quelques détails de peu d'importance,EXACTEMENT RACONTÉE DANS VOSMémoires.Les souvenirs de M. Mauguinle servent mal.JE SUIS SUR DE LA FIDÉLITÉ DES MIENS. Ils concordent, d'ailleurs, parfaitement avecl'Histoire de dix ans, publiée il y a longtemps déjà, et où vous avez, sans doute, puisé les faits contestésaujourd'huipar M. Mauguin.

"Tout à vous.

"CHARRAS

"BRUXELLES, 13mars1853"

QUATRIÈME INFIRMATION

"On a dit, dans votre journal, et M. Dumas a répété, je crois, que M. Casimir Périer nous avait refusé deux millions que nous lui demandions pour une affaire importante; il n'a jamais eu à nous refuser et nous n'avons jamais eu à lui demander deux millions ni aucune autre somme."

RECTIFICATION

"Je n'ai pas dit qu'on eût demandé à M. Casimir Périerdeux millions, somme qui, effectivement, vaut la peine qu'on y réfléchisse avant de la donner.

"J'ai dit:

"La moitié des combattants mourait de faim sur les places publiques, et demandait du pain. On se tourna d'un mouvement unanime vers M. Casimir Périer, le même qui proposait, la veille, d'offrir quatre millions au due de Raguse.Ah! messieurs, répondit-il,j'en suis vraiment désespéré pour ces pauvres diables; mais il est plus de quatre heures et ma caisse est fermée."

RÉPONSE A LA QUATRIÈME INFIRMATION

"Sur ces entrefaites, on vint annoncer que beaucoup d'ouvriers manquaient de pain; il fallait de l'argent. On s'adressa à M. Casimir Périer, qui répondit:IL EST PLUS DE QUATRE HEURES; MA CAISSE EST FERMÉE."

(LouisBLANC,Histoire de dix ans.)

CINQUIÈME ET DERNIÈRE INFIRMATION

"La commission municipale de 1830 n'a pas constitué un gouvernement aussi inactif, aussi introuvable que M. Alexandre Dumas se complaît à l'affirmer. Il s'en serait convaincu lui-même à cette époque, s'il eût seulement jeté les yeux sur les murs de Paris, placardés chaque jour de nos nombreux décrets."

RÉPONSE

M. Mauguin m'accuse à tort de ne pas rendre justice à l'activité de la commission municipale; car, justement, à propos du premier de ses décrets, j'ai écrit ceci dans mes Mémoires:

"Voilà donc la bourgeoisie à l'œuvre, et recommençant, le jour même du triomphe populaire, son travail de réaction!

"Reconnaissez-vous, abordez-vous avec des cris de joie, embrassez-vous, hommes des faubourgs, jeunes gens des écoles, étudiants, poètes, artistes; levez les bras au ciel, remerciez Dieu, criezHosannah!Vos morts ne sont pas sous terre, vos blessures ne sont pas pansées, vos lèvres sont encore noires de poudre, vos cœurs battent encore joyeusement se croyant libres;—et déjà les hommes d'intrigue, les hommes de finance, les hommes à uniforme, tout ce qui se cachait, tremblait, priait pendant que vous combattiez, vous vient impudemment prendre des mains la victoire et la liberté, arrache les palmes de l'une, coupe les ailes de l'autre, et fait deux prostituées de vos deux chastes déesses!

"Tandis que vous fusillez, place du Louvre, un homme qui a pris un vase de vermeil; tandis que vous fusillez, sous le pont d'Arcole, un homme qui a pris un couvert d'argent, on vous calomnie, on vous déshonore là-bas, dans ce grand et bel hôtel que, par une souscription nationale, vous rachèterez un jour, enfants sans mémoire et au cœur d'or! pour en faire don à son propriétaire, qui se trouve ruiné n'ayant plus que quatre cent mille livres de rente!

"Écoutez et instruisez-vous!—Audite et intelligite!

"Voici le premier acte de cette commission municipale qui vient de s'instituer:

"Les députés présents à Paris ont dû se réunir pour remédier aux graves dangersQUI MENAÇENT LA SÛRETÉ DES PERSONNES ET DES PROPRIÉTÉS.—Une commission a été nommée pour veiller aux intérêts de tous, en l'absence de toute organisation régulière."

"Comment concilier, maintenant, la prise de cet arrêté avec ce que dit M. Mauguin, dans la lettre à laquelle nous répondons, de ce même peuple qui, selon la commission municipale,menaçait la sûreté des personnes et des propriétés?

"Voici ce que dit M. Mauguin:

"Jamais autorité ne fut obéie aussi ponctuellement que la nôtre;jamais peuple ne se montra aussi docile, aussi courageux, aussi ami de l'ordre que celui de Paris en 1830.

"Convenons que la commission connaissait bien mal ce peuple ou, le connaissant, lui faisait gratuitement une bien grave insulte!

"Mais la commission ne connaissait pas le peuple; elle ne l'avait pas vu.

"Cela tient à ce que la commission ne fut constituée que le 29 juillet au soir, et que le peuple se battait depuis le 27 au matin.

"Nous attendons les nouvelles dénégations qui peuvent se produire, et nous promettons d'y répondre aussi promptement, aussi catégoriquement, aussi victorieusement qu'à celles de M. le chevalier de Liniers et à celles de M. Mauguin.

"ALEX. DUMAS

"BRUXELLES,ce13mars1853"

NOTE TO P. 357

In the Brussels edition of 1853, Dumas adds: "Happily, these lines of Barbier supply all I could wish to have said:—

Oh! lorsqu'un lourd soleil chauffait les grandes dallesDes ponts et de nos quais déserts,Que les cloches hurlaient, que la grêle des ballesSifflait et pleuvait par les airs;Que, dans Paris entier, comme la mer qui monte,Le peuple soulevé grondait,Et qu'au lugubre accent des vieux canons de fonteLaMarseillaiserépondait;Certe, on ne voyait pas, comme au jour où nous sommes,Tant d'uniformes à la fois;C'était sous des haillons que battaient les cœurs d'hommes;C'étaient, alors, de sales doigtsQui chargeaient les mousquets et renvoyaient la foudre;C'était la bouche aux vils juronsQui mâchait la cartouche, et qui, noire de poudre,Criait aux citoyens: 'Mourons!'.    .    .    .    .    .    .    .    .Mais, ô honte! Paris, si beau dans sa colère,Paris, si plein de majesté,Dans ce jour de tempête où le vent populaireDéracina la royauté;Paris, si magnifique avec ses funérailles,Ses débris d'hommes, ses tombeaux,Ses chemins dépavés et ses pans de muraillesTroués comme de vieux drapeaux;Paris, cette cité de lauriers toute ceinte,Dont le monde entier est jaloux,Que les peuples émus appellent tous la sainte,Et qu'ils ne nomment qu'à genoux;Paris n'est maintenant qu'une sentine impure,Un égout sordide et boueux,Où mille noirs courants de limon et d'ordureViennent traîner leurs flots honteux;Un taudis regorgeant de faquins sans courage,D'effrontés coureurs de salonsQui vont, de porte en porte et d'étage en étage,Gueusant quelque bout de galons;Une halle cynique aux clameurs indolentes,Où chacun cherche à déchirerUn misérable coin des guenilles sanglantesDu pouvoir qui vient d'expirer!Ainsi, quand dans sa bauge aride et solitaire,Le sanglier, frappé de mort,Est là tout palpitant, étendu sur la terre,Et sous le soleil qui le mord;Lorsque, blanchi de bave et la langue tirée,Ne bougeant plus en ses liens,Il meurt, et que la trompe a sonné la curéeÀ toute la meute des chiens,Toute la meute, alors, comme une vague immense,Bondit; alors, chaque matinHurle en signe de joie, et prépare d'avanceSes larges crocs pour le festin;Et puis vient la cohue, et les abois férocesRoulent de vallons en vallons;Chiens courants et limiers, et dogues, et molosses,Tout se lance, et tout crie: 'Allons!Quand le sanglier tombe et roule sur l'arène,Allons! allons! les chiens sont rois!Le cadavre est à nous; payons-nous notre peine,Nos coups de dents et nos abois.Allons! nous n'avons plus de valet qui nous fouailleEt qui se pende à notre cou.Du sang chaud! de la chair! allons, faisons ripaille,Et gorgons-nous tout notre soûl!'Et tous, comme ouvriers que l'on met à la tâche,Fouillent ces flancs à plein museau,Et de l'ongle et des dents travaillent sans relâche,Car chacun en veut un morceau;Car il faut au chenil que chacun d'eux revienneAvec un os demi-rongé,Et que, trouvant au seuil son orgueilleuse chienne,Jalouse et le poil allongé,Il lui montre sa gueule encor rouge et qui grogne,Son os dans les dents arrêté,Et lui crie, en jetant son quartier de charogne:'Voici ma part de royauté!'"


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