VIII.—Les Saintes Femmes au tombeau. La Madeleine regarde le fond du sépulcre, sa charmante tête est vue en raccourci et la Sainte s'abrite les yeux de la main pour ne pas être éblouie par les rayons lumineux qui entourent le Christ apparaissant radieux au-dessus du sépulcre. A gauche, saint Dominique à genoux.
IX.Le Couronnement de la Vierge. Dans la partie supérieure sont assis Jésus et la Vierge, tous deux drapés de blanc; la Vierge joint les mains et d'un mouvement gracieux se penche en avant pour recevoir la couronne.
Dans le bas de la fresque sont agenouillés saint Thomas d'Aquin, saint Dominique, saint François, saint Pierre martyr, et deux autres saints.
X.—La Circoncision avec Saint Pierre martyr, joli profil de la Vierge debout.
XI.—La Vierge sur un trône, entre un Évêque et Saint Thomas d'Aquin.
L'appartement du prieur est à l'extrémité du couloir et comprend:
XII.—Antichambre avec trois fresques de Fra Bartolommeo.
XIII.—Cabinet de travail.
XIV.—Cellule.
Ces deux pièces, les seules qui ne soient pas décorées de fresques, ont été habitées par Savonarole dont elles conservent des souvenirs. Les plus intéressants sont: la bannière qui le suivait partout: elle est en toile avec un Christ peint sur ses deux faces par l'Angelico; une copie d'un tableau de l'époque représentant son bûcher dressé sur la place de la Seigneurie; et son portrait par Fra Bartolommeo, tête de profil.
XV.—Saint Dominique au pied de la Croix.
XVI.XVII.XVIII.Saint Dominiquereprésenté dansXIX. les attitudes les plus diversesXX.XXI.
XXII.—La Vierge au pied de la Croix. Mater Dolorosa d'une superbe expression.
XXIII.—Christ en croix entre la Vierge et un Dominicain.
XXIV.—Baptême de Jésus-Christ avec Saint Antonin.
XXV.—Christ en Croix entre la Vierge, la Madeleine et saint Antoine.
XXVI.—Le Christ mort, debout dans le tombeau, étend les mains en signe de résurrection. Derrière lui se dresse la Croix, autour de laquelle apparaissent sur un fond noir les scènes de la Passion. A droite, l'Ecce Homo avec les mains et la bouche sacrilèges. Au-dessous, la main de Judas et la main qui lui donne les pièces d'or; enfin à gauche, le baiser de Judas et la tête de Pierre vers laquelle se penche le profil de la servante qui lui dit: «Vous êtes aussi de ces Nazaréens»; derrière eux une main tient trois petits bâtons indiquant les trois renonciations de Pierre.
Sur le devant du tombeau, la Vierge est assise à gauche, profondément inclinée, tandis qu'à droite saint Thomas d'Aquin agenouillé presse un livre sur sa poitrine.
XXVII.—Le Christ à la colonne avec la Vierge accroupie et saint Dominique se flagellant.
XXVIII.—Le Christ portant sa croix suivi de la Vierge mère apparaît à saint Dominique agenouillé.
XXIX.—Le Christ en Croix avec la Vierge et saint Pierre martyr.
XXXI.—Jésus aux Limbes. Ancienne cellule de saint Antonin (Antonio Pierozzi), mort archevêque de Florence en 1459; souvenirs de saint Antonin: son masque et son portrait au crayon, œuvre de Fra Bartolommeo.
XXXII.—Le Christ enseignant les Apôtres. Dans la petite pièce voisine,Tentation de Jésus-Christ.
XXXIII.—Jésus-Christ au Jardin des Oliviers, scène mouvementée comprenant le baiser de Judas et saint Pierre coupant l'oreille de Malchus. Dans cette cellule est un petit tableau, laMadone della Stella, ainsi nommée de l'étoile placée sur son front. Elle se détache debout sur un fond d'or entourée d'anges l'encensant et faisant de la musique; les trois délicats petits médaillons de la prédelle représentent saint Pierre martyr, saint Dominique et saint Thomas d'Aquin. Dans la pièce voisine:Couronnement de la Vierge. Ce tableau n'a pas la finesse ordinaire des œuvres de l'Angelico, il a les mêmes tons lourds quele Jugement dernierde l'Académie.
XXXIV.—Jésus au Jardin des Oliviers. A droite, la maison de Marthe et de Marie assises sur le seuil, lisant et priant. Dans cette cellule est un ravissant petit tableau de l'Angelico divisé en deux parties: dans le haut,l'Annonciation; dans le bas,l'Adoration des Mages; toutes les figures d'une grande finesse sur fond d'or estompé et divisé en une quantité de petits compartiments.
Dans la prédelle,la Madone entourée de dix Saints.
XXXV.—La Cène. Huit Apôtres sont assis derrière la table, quatre autres à genoux, et le Christ debout, tenant un ciboire, leur donne la communion. A gauche est agenouillée la Vierge.
XXXVI.—La Mise en Croix.
XXXVII.—Le Calvaireet ses trois croix derrière lesquelles sont saint Jean, la Vierge, saint Dominique, saint Thomas d'Aquin.
XXXVIII—Cellule où Cosme l'Ancien venait se reposer et partager la vie des dominicains.Le Christ en Croix: au pied de la croix sont agenouillés saint Cosme, la Vierge, saint Jean et saint Pierre martyr.
XXXIX.—Oratoire de Cosme communiquant par quelques marches avec la cellule précédente. Au-dessus du tabernacle et au fond d'une petite niche,Christ mort, debout dans son tombeau. La fresque, plus importante que celles des autres cellules, occupe les lunettes du fond de l'oratoire, et représentel'Adoration des Magesoù se groupent admirablement de nombreux personnages. La figure de saint Joseph, drapée de jaune, est une des plus belles.
XLIII.—Christ en Croixavec la Vierge défaillante soutenue par saint Jean et la Madeleine. A droite, saint Thomas d'Aquin agenouillé et pleurant.
XLII.—Christ en Croix frappé de la lance. Il est entre Marthe, Marie et saint Jean martyr.
Entre les cellules quarante-deux et quarante-trois, s'ouvre la belle salle de la Bibliothèque, divisée en trois nefs par deux rangées de colonnes ioniques supportant des arcs cintrés.
La bibliothèque fut construite en 1441 par MICHELOZZO sur l'ordre de Cosme l'Ancien, qui la dota de quatre cents manuscrits.
La vitrine du milieu contient des livres de plain-chant et des missels enrichis de miniatures du XVe siècle; ils proviennent des anciens couvents de Florence supprimés depuis.
N° XV.—Fra Eustachio Donimeni, du couvent de San Marco. Cartouches séparés par des enfants courant au milieu de rinceaux.
N° I à XIV.—Fra Benedetto del Mugello, frère de Fra Angelico, missels provenant de San Marco.
L'ÉGLISE DE SAN MARCOa été fondée en 1290. Elle a été transformée au XVIe siècle. Sa façade, à gauche de l'entrée du couvent, date de 1780.
A l'intérieurau-dessus de la porte,Crucifixà la détrempe sur fond d'or par Giotto.
Deuxième autel à droite. FRA BARTOLOMMEO.Vierge debout devant un trône, entourée de quatre saints et de deux saintes à genoux, d'une couleur chaude et dorée; cette remarquable œuvre du Frate fut peinte en 1509.
Troisième autel à droite. Vieille mosaïque romaine représentant une grande Vierge bénissant, sur fond d'or; la bordure est une addition moderne.
A gauche, sous des fragments de fresques, sont les plaques commémoratives de Pic de la Mirandole, mort en 1494, et d'Ange Politien, mort la même année.
LE CLOÎTRE DELLO SCALZO, 69, via Cavour (clef au musée de San Marco). Ce joli petit cloître du XVIe siècle dépendait d'un couvent de carmes déchaussés; il est entièrement formé par de larges baies vitrées que séparent de délicates colonnes. Ses murs sont décorés d'admirables fresques en camaïeu brun sur brun, peut-être le chef-d'œuvre d'ANDRÉ DEL SARTO, exécutées par le maître entre les années 1515 et 1525, pendant lesquelles il y travailla presque sans interruption. Le parti pris d'uniformité semble avoir été adopté par Andrea pour lui permettre de donner la mesure de son talent. Dans ces fresques où aucune magie de coloris n'aide à l'illusion ou n'ajoute au plaisir des yeux, il s'est élevé à une extraordinaire hauteur d'art, et cette œuvre de sa maturité allie la noblesse du sentiment à la hauteur des idées, la puissance et la largeur du dessin à la somptuosité de l'architecture et des ornements qui parent et encadrent les fresques.
Deux des compositions,le Baptême du peuple par saint Jean-Baptisteetla Décollation de Saint Jeansont peut-être encore supérieures aux autres et semblent la continuation et presque le commentaire des fresques de Masaccio au Carmine, avec les progrès réalisés par un siècle de technique en plus. L'influence si prépondérante exercée par le génie d'Albert Dürer sur le talent d'Andrea est très visible dans les fresques de laTentation au désert, de laRemise à Salomé de la tête de saint Jean, et enfin dans la belle allégorie de laCharité.
Seize fresques relatives à la vie de saint Jean-Baptiste décorent le cloître:
1°—La Foi(1520);
2°—Apparition de l'Ange à Zacharie(1525);
3°—La Visitation(1524);
-4°—La Naissance de Saint Jean-Baptiste(1526);
5°—La Mission de Saint Jean-Baptiste(1518);
6°—Rencontre avec Jésus-Christ(1519).
(Ces deux fresques furent exécutées par l'ami d'Andrea, Franciabigio, dont il se faisait quelquefois aider dans ses grands travaux.)
7°—Baptême de Jésus-Christ(1515).
(Cette fresque, la moins bonne de toutes, est due à la collaboration des deux artistes.)
8°—La Justice(1515);
9°—La Charité(1520);
10°—Prédication au désert(1515);
11°—Saint Jean-Baptiste baptisant le peuple(1517);
12°—Saint Jean-Baptiste arrêté(1517);
13°—Festin d'Hérode et danse de Salomé;
14°—La Décollation de Saint Jean-Baptiste(1523);
15°—La tête de saint Jean-Baptiste remise à Salomé(1524);
16°—L'Espérance(1525).
PALAIS RICCARDI, SAN LORENZO, SANTA APOLLONIA, SAN ONOFRIO.
LE PALAIS RICCARDI(Via Cavour).—Jusqu'à Cosme l'Ancien, les Médicis avaient occupé la vieille demeure petite et sombre, berceau de leur famille; ils s'étaient contentés du «comptoir» source de la fortune de leur maison. L'insuffisance relative de cette habitation, par rapport aux ambitieux desseins de Cosme, le décida à confier à Michelozzo l'édification d'un palais somptueux. Le palais Médicis est un quadrilatère aux formes lourdes où fut employé pour la première fois l'ordre rustique aux bossages si atténués au fur et à mesure de la hauteur, que leur saillie se perd dans un mur plat que surmonte une formidable corniche écrasant l'édifice.
C'est dans ce palais que naquit Laurent le Magnifique, le 1er janvier 1449. C'est là qu'il tint sa brillante cour; là que naquirent ses trois fils, Pierre, Jean et Julien; là qu'habitèrent plus tard Jules de Médicis, pape sous le nom de Clément VII, Hippolyte de Médicis, cardinal, et enfin Alexandre de Médicis qui fut le premier grand-duc. Malgré les souvenirs évoqués par cette demeure, le grand-duc Ferdinand II la vendit en 1659 au marquis Riccardi dont elle a conservé le nom, bien qu'elle soit actuellement devenue la préfecture de Florence.
La Coura servi de modèle aux innombrables cours construites au XVIe siècle. C'est un quadrilatère entouré de portiques dont les arcades retombent sur des colonnes corinthiennes. Au-dessus des arcades règne une frise où alternent sculptées les armes des Médicis et des bas-reliefs dans lesquels Donatello, par l'ordre de Cosme, reproduisit avec sa perfection accoutumée les principales pièces de sa collection de camées antiques.
Au premier étage, se trouve la chapelle fameuse décorée des fresques de BENOZZO GOZZOLI. C'est une très petite pièce carrée, sur laquelle fut encore empiété au XVIIIe siècle par le déplacement compliqué d'une partie de mur qu'on opéra pour former une entrée en tambour plus commode, sans toutefois supprimer la peinture. On a en outre ouvert dans un mur une fenêtre et un œil-de-bœuf; ces actes de vandalisme ont malheureusement endommagé les précieuses peintures de Gozzoli. Néanmoins, telles qu'elles subsistent, elles restent un inestimable monument de l'art florentin du XVe siècle.
Toute peinture, et en général tout art parvenu à son apogée, adapte forcément sa perfection aux goûts, aux idées et aux mœurs de leur époque. Pour les Florentins du XVe siècle, la passion dominante était un certain genre historico-allégorique où l'on aimait à se faire représenter avec sa famille et ses familiers dans des sujets soit absolument profanes, soit, à l'inverse, absolument sacrés.
Après la mort de Laurent le Magnifique, Pierre de Médicis résolut donc de confier à BENOZZO GOZZOLI la décoration de la chapelle de son palais, décoration dans laquelle l'artiste aurait à faire revivre les traits des principaux membres de sa maison.
Benozzo, après s'être séparé à Rome de son maître l'Angelico, avait été retenu plusieurs années à Montefalco par de nombreux travaux et se trouvait à Pérouse, quand les ordres de Pierre de Médicis vinrent l'appeler à Florence. C'est en 1457 que fut passé le contrat par lequel l'artiste s'engageait à «exécuter une marche des rois Mages en route pour Bethléem dans laquelle auraient à figurer les chefs des Médicis sous l'aspect des Rois, accompagnés de leurs amis et de leurs clients». Les conditions arrêtées, le travail commença aussitôt et Benozzo tira un parti admirable de ce cortège de seigneurs à cheval, en somptueux costumes du XVe siècle, suivis des plus jolis pages qu'ils eussent pu choisir dans la jeunesse florentine. Ces nobles florentins ont plutôt l'air de se rendre à la chasse ou à leurs vignes, que d'accomplir un pèlerinage, mais on n'éprouve pas un moindre plaisir à les voir promener leurs portraits et leurs robes de brocart et donner eux-mêmes le spectacle de leur élégance et de leur luxe.
Le retrait ménagé dans la pièce pour l'autel est mieux éclairé que le reste et tout peuplé d'anges, aux ailes dorées, semées d'yeux de paons. Ils sont comme les enfants de ceux de l'Angelico, plus modernes, plus humains, plus substantiels pour ainsi dire, que leurs aînés. Ils ont revêtu, eux aussi, leurs plus belles robes, autant pour assister à la messe des Médicis que pour venir adorer le Christ dont la naissance faisait autrefois le retable de l'autel. Aimables au possible, souriants, sagement rangés en ligne, comme il sied à des pensionnaires du Paradis, ils arrivent par troupes et par vols, ils accourent du fond des campagnes enchantées pour venir se mettre en adoration. Dans le nombre il s'en est détaché quelques-uns, celui-ci pour cueillir des fleurs, celui-là pour donner à manger à un paon, d'autres encore pour tresser des guirlandes de roses; qui croirait que les anges du Paradis se permettent, eux aussi, de faire l'école buissonnière! Dans cette pompeuse marche à travers un fantastique pays de montagnes et de gorges, cavaliers, pages, écuyers s'arrêtent, les uns pour chasser au guépard, les autres pour courre le cerf ou lancer le faucon. L'Évangile devient un simple prétexte pour peindre une des scènes les plus mondaines que jamais peintre nous ait laissées.
La cavalcade se déroule sur le mur de gauche avec Cosme de Médicis monté sur un cheval blanc et suivi d'une foule compacte. Après lui, elle tourne sur le fond où est représenté Laurent le Magnifique somptueusement vêtu, sous les traits d'un jeune homme; il est monté sur un cheval richement caparaçonné, et escorté de gens de pied et de cheval portant des présents.
Jean Paléologue les précède, grave et majestueux; il porte le turban d'où sort la couronne; autour de lui des pages à pied, d'une grâce charmante, se détachent sur un riant paysage. Aux rochers abrupts ont succédé des vallées arrosées, coupées de routes, couvertes de villes ou de châteaux, mais tout cela d'une grande naïveté et jalonné d'arbres à silhouettes extraordinaires.
Sur le mur de droite le patriarche grec, vieillard monté sur une mule grise, a été coupé par le malheureux tambour d'entrée. Plus loin est un des plus beaux morceaux de la fresque, le groupe des cavaliers arrêtés sur le bord d'un ruisseau. Après eux la marche s'achève par des routes tortueuses où circulent les chameaux et les mulets chargés de présents.
La préservation de cette belle œuvre est prodigieuse et ne peut se comparer qu'à celle du Pinturicchio de la Libreria de Sienne. Pas une nuance n'est ternie, pas un contour n'est effacé et les fresques restent aussi fraîches et aussi éclatantes de grâce juvénile que le jour où elles sortirent du pinceau de Benozzo.
La Salle du Conseilest ornée de grandes tapisseries de la manufacture de Florence, Allégories des Saisons, et de quatre petites, la Justice, la Foi, l'Espérance et la Charité.
La triste partie ajoutée au XVIIe siècle par le marquis Riccardi contient une grande salle des fêtes dont le plafond et une considérable fresque allégorique out été peints par LUCA GIORDANO.
PLACE SAN LORENZO. A l'angle nord est une mauvaise statue inachevée deJean des Bandes Noires, père du grand-duc Cosme Ier, par BACCIO BANDINELLI.
L'ÉGLISE SAN LORENZO, fondée en 390 par saint Ambroise, mais incendiée en 1420, fut reconstruite sur les plans de BRUNELLESCHI en 1425, aux frais communs des sept plus nobles familles florentines et des Médicis. L'église n'a pas de façade, celle que devait exécuter Michel-Ange n'ayant jamais été entreprise.
IntérieurementBRUNELLESCHI renouvela le plan de la vieille basilique chrétienne à nefs égales terminées par un transept droit, mais il plaça au-dessus des colonnes l'entablement antique supprimé par le moyen âge et ouvrit sur les côtés des chapelles en forme de niches. La coupole, placée directement sur la croisée, n'est pas l'œuvre de Brunelleschi. Au-dessous d'elle est la belle et très simple plaque tombale deCosme le Vieuxpar VERROCCHIO.
Les deux chaires de l'église ou, pour parler plus exactement, les deux ambons, puis qu'elles ont la forme traditionnelle de sarcophages élevés sur des colonnes et isolés de toute part, sont une des dernières œuvres de la vieillesse de DONATELLO, terminée même par son élève BERTOLDO.La Crucifixion, la Mise au tombeau, la Descente aux Limbes, la Résurrectionetl'Ascension, tels sont les sujets représentés dans les chaires par des bas-reliefs en bronze. Sila Crucifixionetla Mise au tombeau, malgré leurs lacunes, présentent encore des beautés de premier ordre, on ne saurait en dire autant des trois bas-reliefs opposés qui trahissent une défaillance et une espèce d'agitation fébrile. Leur groupement factice produit presque une impression de malaise, tant le maniérisme en est excessif et exagéré.
Dans l'uniquechapelle du transept gauche,l'Annonciationde FRA FILIPPO LIPPI est une des meilleures œuvres tardives du Frate, elle est d'un charmant et délicat sentiment; sous un portique ouvert sur un délicieux fond de paysage, l'Archange, accompagné de deux anges, se prosterne devant la Vierge.
Au mur de laChapelle du Saint-Sacrement, au fond du transept droit, est appuyé un tabernacle de marbre blanc, chef-d'œuvre de DESIDERIO DA SETTIGNANO.
L'Enfant Jésus, les deux anges en adoration devant lui, ainsi que les deux figures d'enfants de chœur agenouillés de chaque côté, sont des études d'enfants qu'on ne saurait désirer plus parfaites.
Sur le bas-côté gauche, au-dessus de la porte d'accès au cloître, s'ouvre latribune des Médicis, joli balcon, soutenu par des consoles et formé de niches séparées par des colonnes; c'est un ouvrage de DONATELLO.
L'ancienne sacristieconstruite par BRUNELLESCHI est une salle carrée de belles proportions, couronnée par une coupole polygonale. DONATELLO fut chargé par Cosme l'Ancien de sa décoration, travail dont il s'acquitta en respectant si bien l'architecture de Brunelleschi que l'ensemble forme le tout le plus homogène.
Au-dessous de la coupole, huit médaillons contiennent alternés un épisode de la vie du Christ et un Évangéliste assis, auquel son attribut présente son évangile. Sous cette première décoration court une étroite frise en stuccato composée de têtes de chérubins.
Les deux portes à double battant de la sacristie sont divisées en cinq panneaux de bronze où sont représentés en bas-relief des Apôtres et des saints. Chacune est surmontée d'un saint grandeur nature, bas-relief en marbre. Toute cette composition est d'une rare beauté et DONATELLO l'a traitée avec une remarquable perfection.
Au milieu de la sacristie est une vaste table rectangulaire soutenue par des colonnes au-dessus du sarcophage, œuvre de Donatello, où reposent les parents de Cosme l'Ancien,Jean Averado de Médiciset Piccarda Bueri, sa femme.
A gauche de l'entrée est un admirable sarcophage en porphyre décoré de bronzes, ouvrage de VERROCCHIO. Il contient les restes dePierre de Médiciset de son frèreJean, les deux fils de Cosme. Les cendres deLaurent le Magnifiquey furent également transférées par la suite.
Sur une des armoires de la sacristie est placé un ravissant buste en terre cuite de DONATELLO,Saint Laurentreprésenté très jeune et levant au ciel des yeux inspirés.
LA BIBLIOTHÈQUE LAURENTIENNEa son entrée dans le cloître dont elle occupe au premier étage toute une aile; elle fut exécutée par MICHEL-ANGE sur l'ordre de Clément VII.
L'escalier qui y donne accès devait, dans la pensée de Michel-Ange, offrir un aspect grandiose et monumental, mais il ne l'exécuta pas lui-même et, par malheur, ce fut Vasari qui s'en chargea. La lourdeur de cet ouvrage, qui jure avec les belles proportions du reste, donne la mesure de ce que peut perdre un plan à être interprété par un architecte autre que l'auteur du projet primitif.
Le vestibule qui suit l'escalier est d'une austère simplicité. Ses colonnes devaient supporter un ordre supérieur que Michel-Ange n'acheva jamais.
La salle de la bibliothèque est également fort simple dans ses belles proportions, mais la perfection des moindres détails y est poussée à l'extrême. Michel-Ange présida lui-même à tout, ce qui donne à l'ensemble un aspect d'homogénéité et d'harmonie parfaites.
Ainsi les dessins de l'admirable plafond en bois de cèdre se reproduisent renversés sur le pavé de marbre; les bancs et les pupitres alignés sur les côtés, exécutés par CIAPINO et DEL CINQUE, le furent sous la direction du maître, de même que les vitraux des fenêtres avec leurs légères arabesques de deux tons peints sur ses indications par JEAN D'UDINE.
La Bibliothèque est une des plus riches qu'il y ait. Cosme l'Ancien avait déjà commencé cette belle collection, qui fut enrichie par Laurent des livres les plus rares achetés à prix d'or. Leurs successeurs continuèrent à l'augmenter, aussi les manuscrits précieux y sont-ils en grand nombre. Le plus ancien est un Virgile du IVe siècle. Parmi les plus remarquables, figurent un Tacite du Xe siècle; les lettres familières de Cicéron écrites de la main de Pétrarque, de même que ses sonnets; l'original duDécameronde Boccace; une des premières copies manuscrites de l'Enferdu Dante; lesCommentairesde César copiés pour Charles VIII et ornés d'une miniature le représentant au milieu de son camp; enfin tout l'ordre des livres ecclésiastiques, bibles, évangiles, Pères de l'Église, dans les éditions les plus rares et les plus curieuses.
Les Chapelles Médicis, autrefois dépendantes de l'église Saint-Laurent, forment maintenant un musée où l'on entre, derrière l'église, par la place della Madonna.
La première chapelle à laquelle on accède estla Chapelle des Princes, édifiée en 1604 par MATTEO NIGELLI, sur les plans de Jean de Médicis, pour servir de sépulture aux grands-ducs; c'est une vaste construction octogonale, terminée par un dôme qui s'ouvrait jadis sur le chœur de l'église par lequel on y accédait directement.
Cette chapelle, revêtue d'une profusion de marbres et de pierres dures multicolores, est anti-artistique. Autour sont rangés six sarcophages de grands-ducs tous semblables; ils sont en granit, surmontés de la couronne ducale posée sur un coussin. Deux niches contiennent les statues en bronze doré de Cosme II par JEAN DE BOLOGNE et de Ferdinand par TACCA.
La Nouvelle Sacristie.—Dès l'année 1520, le pape Léon X et le cardinal Jules de Médicis, plus tard pape sous le nom de Clément VII, tombèrent d'accord sur l'opportunité de demander à MICHEL-ANGE, alors dans toute sa célébrité, qu'il se chargeât d'édifier une nouvelle sacristie à l'église San Lorenzo, sorte de Panthéon pour leur famille. Dans leur pensée, cette salle devait contenir leurs propres sépultures en même temps que celles des principaux membres de leur maison; mais par la suite ces monuments funèbres se réduisirent à deux: celui de Julien, duc de Nemours, frère de Léon X, et celui de Laurent, duc d'Urbin, son neveu, le petit-fils de Laurent le Magnifique. Toute latitude était laissée à Michel-Ange pour la construction de cette Sacristie Neuve, destinée à faire vis-à -vis, dans le transept droit, à la Vieille Sacristie de Brunelleschi, qui occupait le transept gauche. Les phases diverses par lesquelles passa ce travail marquèrent des heures tragiques. Commencé dans le vif contentement que faisait éprouver à Michel-Ange l'élévation de Clément VII au siège apostolique, puis abandonné pendant la révolution de Florence, il fut repris et achevé après la prise de la ville, sur l'ordre formel du pape, qui mettait à ce prix le pardon de l'artiste coupable de républicanisme et de rébellion.
Tant d'alternatives dans la vie de Michel-Ange commentent d'une façon dramatique l'histoire de ce monument. Tour à tour favori, courtisan, citoyen, proscrit, enfin rentré en grâce après avoir vu sa vie en danger, s'il se sentit l'âme agitée et souffrante, le temps où il vécut fut terrible et affreusement troublé!
L'œuvre est une des plus complètes qu'ait laissées le maître, tant l'architecture et la sculpture contribuent par leur harmonie à rendre l'effet général imposant. La sacristie est une salle carrée aux dimensions restreintes, quoique la justesse de ses proportions la fasse paraître grande. La hauteur en semble considérable, grâce à l'artifice des caissons en perspective qui décorent la coupole terminée par une lanterne. L'ornementation consiste en deux ordres de pilastres très simples, destinés, dans l'idée de Michel-Ange, à servir d'encadrement à des niches remplies de statues. Ce projet resta malheureusement inexécuté, car à la mort de Clément VII survenue en 1534, Michel-Ange, abreuvé d'amertumes et voyant Alexandre de Médicis étouffer dans le sang toute velléité d'indépendance, jugea suffisamment payée sa dette de reconnaissance envers ses premiers patrons et quitta définitivement Florence.
Les parties terminées des monuments des Médicis ne furent même pas mises en place par le maître, et ce fut Vasari qui, en 1563, leur donna leur emplacement actuel; fâcheuse intervention dont est résultée la disproportion trop saillante entre les sarcophages dus à Vasari et les statues qu'ils supportent. Léon X, quand il commanda ces tombeaux à Michel-Ange, était loin de lui assigner une tâche facile. Il devait en effet immortaliser des rejetons médicéens plus que médiocres pour lesquels le Pape ne rêvait rien moins que de pompeux sujets allégoriques ou des Vertus exaltant le mort. L'artiste opposa aux vœux de Léon X une fin de non-recevoir systématique, et se borna à des figures purement décoratives, figures devenues célèbres sous le nom duJouret de laNuit, duCrépusculeet de l'Aurore. Dans ces admirables compositions, son génie semble avoir pris à tâche de démontrer combien la matière doit peu compter pour l'artiste et combien elle doit, comme cire molle, se plier à toutes les expressions de la pensée, à toutes les exigences de la volonté.
Les monuments des deux princes ont une ordonnance semblable et se font face, la statue de chacun est assise dans une niche au-dessous de laquelle sont les sarcophages sur lesquels Vasari a placé les grandes figures allégoriques de Michel-Ange.
A droite,Julien de Médicis, duc de Nemours, est représenté en costume romain avec la cuirasse. Il a en main son bâton de général des États de l'Église, et sa tête nue très frisée est inintelligente.
A gauche,Laurent de Médicis, de par Léon X duc d'Urbin, est une des plus admirables créations qui soient dues au ciseau de Michel-Ange. Le maître, inspiré par la tragique figure de ce Laurent qui fut tout à la fois violent, débauché et misanthrope, accusa plus encore l'aspect farouche du visage en l'abritant profondément sous la visière saillante du casque qui le plonge dans une ombre redoutable, pleine de mystère. Laurent rêve, le menton appuyé sur la paume de la main, mais on se demande à quel sombre drame peut ainsi songer éternellement ce visage crispé d'angoisse, au sourcil si violemment froncé que le surnom de «Pensiero» lui est resté comme pouvant seul vraiment convenir à cette tragique figure.
Au-dessous de Julien sont couchés le Jour et la Nuit, tandis qu'au-dessous de Laurent ce sont le Crépuscule et l'Aurore.
Le génie même de Michel-Ange semble résumé dans ces quatre magnifiques allégories où, à côté de parties à peine ébauchées, circulent le sang et la vie sous l'épiderme du marbre. L'angoisse même de son âme semble avoir trouvé à s'exhaler dans un cri de terreur et d'effroi devant la dureté des temps et elles reflètent tragiquement le sombre état de ses pensées et l'anéantissement douloureux de ses aspirations, en face du présent sinistre et de l'avenir obscur et incertain.
Pour un esprit d'une pareille profondeur, que pouvait symboliser le Crépuscule, sinon le jour achevé sans espoir, et que voir dans le visage accablé de l'Aurore, sinon l'immense découragement d'un jour semblable succédant au précédent?
Mais il semble en vérité que Michel-Ange ait réservé toute la puissance de son génie et qu'il ait attaché tout son amour à la tragique figure de la Nuit. Accablée sous le poids du Jour, la Nuit dort et son beau corps, irrémédiablement abîmé, s'abandonne dans une fatigue incurable, sans espoir et sans fin! On sent que jamais rien ne la réveillera du grand sommeil sans songes, et l'on dirait une sorte de déesse primordiale sur laquelle aurait passé le souffle des théogonies antiques.
A côté d'elle est placé le Jour, sous l'aspect d'un homme enchaîné, dans toute l'énergie du désespoir. Il est captif, mais il ne s'avoue pas vaincu, son visage contracté est plein de mépris et de colère, tandis que tous ses muscles, douloureusement bandés, montrent par quel effort surhumain il tente de se lever pour éclairer le monde.
Sur un des côtés de la chapelle est placée une belle Vierge inachevée qui, par sa grave et noble attitude, semble directement procéder de l'antique, tandis que l'Enfant de deux ou trois ans qui, debout et plein de vie, se retourne vers sa mère d'un charmant mouvement de précipitation, est d'un modernisme délicieux.
Les deux patrons des Médicis, lesSaints CosmeetDamien, placés de chaque côté de la Vierge, sont des œuvres médiocres de deux élèves de Michel-Ange, MONTELUPO et MONTORSOLI.
L'ÉGLISE SANTA APOLLONIAsert maintenant de magasin d'habillements militaires. Dansl'ancien réfectoiredu couvent de bénédictins dont elle dépendait est conservée une magnifique fresque,la Cèned'ANDREA DEL CASTAGNO, chef-d'œuvre d'exécution, d'émotion et de réalisme. Chacun des disciples est un portrait admirable, chacun d'eux participe à l'action, selon le caractère et la nature que lui a attribués la légende. Ainsi l'incrédulité de Thomas, l'adoration de Jean, l'étonnement défiant de Pierre, le cynisme sinistre de Judas sont marqués admirablement. Cette belle œuvre, d'une conservation remarquable, a été exécutée en 1425.
Au-dessus de la porte d'entrée du Cenacolo, Castagno a encore peint dans une lunette une magnifiquePietà , un Christ mort soutenu dans son tombeau par deux anges.
Via Faenza au n° 57, dans l'ancien COUVENT DE SAINT-ONUPHRE, une grandeCènede l'école du PÉRUGIN est faussement attribuée à Raphaël.
SS. APOSTOLI, SANTA TRINITA, VIA TORNABUONI, PALAIS SAN JACOPO INRIPOLI, SANTA MARIA NOVELLA, SAINT-FRANÇOIS VANCHETTONI,OGNISSANTI.
SS. APOSTOLI, vieille basilique reconstruite au XVe siècle, dont la fondation, d'après une inscription placée près du portail, remonterait à Charlemagne.
A l'intérieur, au fond du bas-côté de gauche, se trouve un beauciboriumen terre vernissée d'ANDREA DELLA ROBBIA. A côté, tombeau d'Oddeo Altovitien forme de sarcophage richement sculpté, bel ouvrage de BENEDETTO DA ROVEZZANO.
Le Palais Rucellai(20, Via Vigna Nuova) fut un des premiers ouvrages du grand architecte florentin LEONE BATTISTA ALBERTI qui le construisit en 1460, et y appliqua pour la première fois l'ordre rustique et les pilastres.
L'ancienneloggiadu palais qui lui faisait face a ses arcades aujourd'hui murées.
LA PLACE SAINTE-TRINITÉs'étend près du pont Santa Trinita. A l'angle de la place et du Lung Arno se trouvele Palais Spinidont la masse carrée a le caractère sévère de la forteresse (XIVe siècle). A côté, le palaisSalimbeni(Hôtel du Nord) fut construit en 1520 par Baccio d'Agnolo.
L'ÉGLISE SAINTE-TRINITÉ, construite en 1250 par NICOLAS PISANO, fut remaniée en 1570 par BUONTALENTI. Elle comporte trois nefs à arcs ogivaux soutenus par le pilier carré romain qu'employa Pisano dès le XIIIe siècle. Sur le transept s'ouvrent le chœur et quatre chapelles.
En entrant par la porte latérale (sur la via Parione) garnie d'«Avelli», la première chapelle du transept est lachapelle Sassetti, décorée en 1485 par DOMINIQUE GHIRLANDAJO de six fresques consacrées à Saint François d'Assise, commandées par François Sassetti. Dans la partie supérieure du mur du fond, le pape Honorius approuve la règle de l'ordre; dans la partie inférieure, saint François ressuscite un enfant de la maison Spini. Cette scène, très intéressante par sa composition, se passe sur la place Santa Trinita, devant l'église et le palais Spini; au bas sont les donateurs, François Sassetti et sa femme Nera Corsi. Au haut de la fresque du mur de droite, saint François devant le Sultan; au-dessous, les funérailles de saint François, belle composition inspirée de la fresque identique du Giotto à Santa Croce.
De chaque côté de la chapelle, enfermés dans une niche cintrée, encadrée de délicats bas-reliefs inspirés de l'antique, se trouvent les tombeaux deFrancesco Sassettiet deNera Corsi, ouvrages remarquables de JULES DE SANGALLO. Les sarcophages en marbre noir sont simplement ornés de bucranes.
LA VIA TORNABUONIprolonge la place Santa Trinita et contient le plus beau palais de Florence, lePALAIS STROZZI. Commencé en 1489 sur les plans de BENEDETTO DA MAJANO pour le célèbre Philippe Strozzi, l'adversaire acharné des Médicis, il ne fut achevé qu'en 1553. Le plus beau des palais florentins à bossages, ses trois façades sont d'ordre rustique uniforme, une simple plinthe servant d'appui aux étages percés de belles fenêtres géminées.
La caractéristique du palais Strozzi est dans les superbes lanternes cylindriques en fer forgé placées à ses angles. Décorées des Croissants, armes des Strozzi, elles sont hérissées de pointes recourbées qui en forment le couronnement.
Des porte-flambeaux et des anneaux en fer forgé décorent la façade.
LE PALAIS STROZZINO, de même style, mais moins vaste, est situé derrière le palais Strozzi, sur une petite place.
PALAIS CORSINI.Galerie.
N° 167.—BOTTICELLI.La Vierge, l'Enfant et deux Anges.
Tableau de la jeunesse du maître, peint encore sous l'influence directe de Fra Filippo Lippi, mais avec une profondeur de coloris tout autre.
N° 162.—FILIPPINO LIPPI. Médaillon,la Vierge et l'Enfant entourés d'anges, un des premiers ouvrages de Filippino et une des rares œuvres peintes sous l'influence directe de son père.
N° 5.—MEMLING. Très beau portrait d'homme, de la première manière de Memling, sous l'inspiration de Roger Van der Weyden.
SIGNORELLI. Ravissant et délicat tableau dela Vierge avec l'Enfant, entourés de Saint Jérôme et de Saint Bernard.
PALAIS ANTINORI, belle et sévère façade de Jules de Sangallo.
PALAZZO STROZZI, joli petit bas-relief de Luca. La place Sainte-Marie Nouvelle est décorée de deux petits obélisques de marbre de 1608 reposant sur des tortues de bronze. Ils servaient de but pour les courses au quadrige instituées par Cosme Ier, en 1563.
LA LOGGIA SAINT-PAUL, placée en face de l'église sur un des côtés de la place, a été construite par BRUNELLESCHI en 1451. C'est un long portique dont les écoinçons furent ornés par la suite demédaillonsvernissés, mauvais ouvrage des continuateurs des DELLA ROBBIA.
A l'extrémité du portique, la lunette d'une porte est occupée par une des plus belles œuvres d'ANDREA DELLA ROBBIA,la Rencontre de Saint Dominique et de Saint François, composition d'une intensité et d'une profondeur de sentiment remarquables.
SAINTE-MARIE NOUVELLE. Pendant que l'ordre de Saint François se restreignait dans la pauvreté et la simplicité primitives imposées par son fondateur, l'ordre de Saint-Dominique, suivant l'esprit du sien, se répandait sur toute l'Italie et empiétait dans des proportions si considérables, que Florence, dès le XVe siècle, se trouva obligée de se défendre contre lui. Chassés et proscrits, après un court exil les dominicains revinrent plus puissants que jamais et possédèrent bientôt six couvents tant à Florence qu'à Fiesole, dont celui de Sainte-Marie Nouvelle fut un des premiers.
L'église fut commencée en 1278 par deux dominicains, FRA SISTO et FRA RISTORO, sur l'emplacement d'une église primitive dédiée à la Vierge; elle prit de là le surnom de «Nouvelle». On est frappé encore ici de la préoccupation de construire grand, qui semble avoir été le but unique des architectes italiens des XIIIe et XIVe siècles et dont le résultat, toujours identique, est une froideur et une sécheresse désagréables dans leur nudité presque protestante. Appuyé à l'édifice, subsiste le campanile carré de l'église primitive. Il est, par extraordinaire, du plus pur style roman et ses deux derniers étages, ajourés de part en part, ne sont formés que d'arcatures soutenues sur de sveltes colonnettes; il en acquiert une légèreté aérienne. Il reste encore de l'ancienne construction les six élégants «Avelli» de la façade; ces sortes de niches ogivales servaient chacune de tombes collectives aux plus nobles familles florentines dont elles portaient les armoiries.
LEONE BATTISTA ALBERTI acheva en 1460 toute la décoration extérieure de Sainte-Marie Nouvelle. Il exécuta en premier lieu le revêtement en marbre blanc et noir de la façade, et comme il s'en tint au style gothique déjà employé, ce style, sous la main du plus grand architecte de la Renaissance, gagna une singulière élégance. Leone Battista coupa sa façade en trois ordres: les portes latérales accompagnées des Avelli anciens et d'arcatures aveugles lui formèrent le premier, tandis qu'il composait le second, fortement en retrait, d'une simple et large frise supportant comme troisième ordre le beau pignon terminal. Au milieu de la façade, il inscrivit la haute porte principale, qu'il fit monter presque jusqu'au pignon et qui, flanquée de ses quatre massives colonnes corinthiennes, produit un effet grandiose dans sa simplicité. Sur le côté gauche de l'église en retour d'équerre, d'autres Avelli s'étendaient contre le mur du couvent; mais comme ils ne suffisaient plus par suite de la mode de se faire enterrer à Sainte-Marie Nouvelle, Alberti dut construire, à droite de l'église et formant retour sur la rue Belle-Donne, une sorte de Campo Santo formé d'un mur bas à bandes de marbre alternées où il disposa des Avelli intérieurs et extérieurs construits sur le modèle des anciens et aménagés de la même façon.
A l'intérieur, l'église produit une médiocre impression, et le manque de proportion entre la largeur et la hauteur est d'un mauvais effet architectural.
Sur le mur d'entrée se trouve une précieuse fresque de MASACCIO, malheureusement abîmée et très mal éclairée. Sous une belle et sévère architecture s'enfonce une magnifique perspective simulée par une voûte à caissons de pierre, à l'extrémité de laquelle se tient debout Dieu le Père, la tête touchant au plafond. Cette admirable figure, d'une ampleur et d'une majesté saisissantes, est certainement une des plus belles de la Renaissance. La tête sévère regarde sans voir, les yeux perdus dans l'immensité. Placée en terre au-dessous de lui est la croix dont il soutient les bras avec ses mains et sur laquelle est attaché le Christ dont la tête penchée porte l'expression d'une douleur profonde. Au pied de la croix se tiennent debout la Vierge et saint Jean. Masaccio, rompant avec la tradition, au lieu de représenter la Vierge toujours jeune, l'a résolument peinte sous les traits d'une vieille femme dont le corps usé et fatigué a perdu toute sveltesse et dont le visage ravagé a subi toutes les douleurs, sans pour cela perdre l'expression d'une sérénité presque auguste. En face d'elle, saint Jean fait contraste, tant sa poignante douleur est bien humaine et opposée à la sérénité des êtres divins qui l'entourent et que rien ne saurait atteindre.
En dehors de l'arcade et complètement séparés sont agenouillés les beaux portraits du donateur et de la donatrice, d'une vie et d'un relief saisissants.
Le fond droit du transept est fermé par laChapelle Ruccellaià laquelle on accède par un double escalier. Au fond de la chapelle est la fameuseViergede CIMABUE, figure colossale peinte sur bois. Il est malaisé, en voyant aujourd'hui l'hiératisme raide et maladroit de cette peinture, de s'imaginer la révolution profonde qu'en 1280 causa son apparition. C'est d'elle que peuvent réellement dater les premières tentatives de l'art pour s'émanciper des formules byzantines si négatives de toute originalité.
Il ne faut pas oublier non plus que l'élève et le successeur immédiat de Cimabue fut Giotto, c'est-à -dire le génie dans lequel tout l'art italien devait être contenu en germe. Quand un maître a su, comme Cimabue, former une pareille individualité, l'on ne pourrait trop exalter en lui la beauté du caractère et l'intégrité des sentiments. L'estime de ses concitoyens pour lui était telle que la Vierge de Santa Maria y fut transportée processionnellement, «la République se plaisant par de si grands honneurs à rendre hommage aux vertus du peintre et du citoyen».
A droite dans la chapelle, letombeau de la Beata Villana del Cerchifut exécuté par ROSSELLINO en 1451.
La Sainte, gardée par deux anges, repose sous un baldaquin, les mains croisées et les pieds nus.
A droite du chœur est laChapelle Philippe Strozzi. Derrière l'autel se trouve son tombeau exécuté en 1459 par BENEDETTO DA MAJANO dont il avait été le plus zélé protecteur. Dans la forme grêle du sarcophage de marbre noir et dans les anges qui l'entourent se sent déjà le déclin de la sculpture à la fin du XVe siècle.
En 1502, FILIPPINO LIPPI, à son retour de Rome, fut appelé par les Strozzi à peindre la décoration de leur chapelle. Il était à ce moment sous l'influence directe de Raphaël et sa manière procédait directement de lui avec toutefois une exagération de style frisant le mauvais goût. Aussi la composition des fresques de la chapelle Strozzi est-elle défectueuse; l'architecture désordonnée et tourmentée laisse fort à désirer, enfin l'effet seul est cherché sans aucune préoccupation du sentiment.
La fresque de droite représente lesMiracles de Saint Jean l'Évangéliste, scène bizarre où se confondent les costumes les plus disparates de tous les peuples connus. Celle de gauche est consacrée à unMiracle de Saint Philipperessuscitant une morte.
Le vitrail de la fenêtre fut également composé par Filippino Lippi.
Le chœurest décoré des admirablesfresquesde DOMINIQUE GHIRLANDAJO peintes en 1490 sur la commande de Jean Tornabuoni.
Ce qui frappe surtout en elles, c'est la grâce noble et tranquille des personnages, c'est la vie ordinaire des Florentins d'alors; ce qui les rend si intéressantes, c'est la civilisation, c'est le costume d'une époque dont elles sont les plus précieux documents.
Avec de si grandes qualités, le défaut qu'on pourrait justement leur reprocher serait de manquer de grandeur dans l'expression des idées, d'embourgeoiser presque les sujets sacrés qu'elles relatent. Pour Ghirlandajo, la Naissance de la Vierge est simplement la naissance d'un enfant noble du XVe siècle, avec le cortège des visites de félicitation et le défilé des amis; comme dans la Naissance de saint Jean-Baptiste, il peint la nourrice donnée aux petits Florentins d'alors et la collation prise par la mère après l'événement. Si cette façon d'interpréter l'histoire de la Vierge ou du Précurseur répond mal à la grandeur des faits, il faut pourtant bien reconnaître que personne à l'égal de Ghirlandajo n'eût été capable, avec un tel point de départ, d'arriver d'une telle manière à ses fins.
Dans l'admirable poussée de la peinture au XVe siècle, il est impossible que certains ordres d'idées et de sentiments, certains modes d'interprétation, même à égalité de talent, ne répondent pas mieux que d'autres à l'esthétisme individuel de tel ou tel artiste. En matière d'art, l'éclectisme est la loi de la critique; il consiste à reconnaître la beauté de l'œuvre en elle-même et sous quelque forme qu'elle se présente, car, là où la recherche de la perfection a été égale, il n'est que juste de l'apprécier dans ses manifestations les plus divergentes. Il faut aussi admirer sans réserve les belles et graves figures des contemporains de Ghirlandajo animées d'une vie et d'un mouvement singuliers.
Les fresques sont disposées, de chaque côté du chœur, sur trois rangées de deux sujets chacune; elles sont terminées par une lunette et séparées les unes des autres par des motifs architecturaux. Celles de la partie supérieure ont malheureusement trop souffert pour qu'il soif facile de les distinguer.
MUR DE DROITE.—HISTOIRE DE LA VlERGE.
I.—Joachim chassé du temple.
Dans cette superbe composition, les deux groupes de droite et de gauche sont particulièrement intéressants par les personnages célèbres qu'ils représentent. A gauche, le vieillard sans barbe est Baldovinetti, qui enseigna la peinture et la mosaïque à Ghirlandajo; celui qui, la tête nue, a la main sur la hanche et porte un petit pourpoint bleu et un manteau rouge, est Ghirlandajo lui-même; le personnage aux grosses lèvres et à la chevelure noire est Mainardi, son élève; enfin celui vu de dos est le frère du peintre, David Ghirlandajo.
II.—La Naissance de la Vierge.
Une des plus belles fresques de la série.
Dans une riche chambre florentine, sainte Anne, femme déjà âgée, est couchée tout habillée sur son lit placé sur une estrade. Derrière elle une servante verse de l'eau dans un bassin. Relevée sur un coude, elle contemple la petite Marie dans les bras d'une belle dame assise au milieu de la composition, tandis que de nobles visiteuses s'avancent sur la gauche, vêtues de leurs somptueux habits de fête.
Ces femmes sont la fleur de la société florentine; on sent qu'elles ont tenu à honneur de figurer dans cette œuvre et de venir poser devant le maître. Chacune a son individualité propre, et ces beaux traits florentins si vifs, si intelligents, si presque modernes d'expression.
III.—Présentation au Temple.
IV.—Mariage de la Vierge.
V.—Adoration des Mages.
VI.—Massacre des Innocents.
VII.—(Lunette)Mort de la Vierge.
Composition en partie détruite.
MUR DE GAUCHE.—HISTOIRE DE SAINT JEAN-BAPTISTE.
I.—Apparition de l'Ange à Zacharie. Cette composition remarquable est enrichie de beaucoup de portraits admirables, entre autres ceux de tous les donateurs des fresques, les Tornabuoni jeunes ou vieux placés en arrière de Zacharie. Au bas, Ghirlandajo a peint à mi-corps les quatre plus savants hommes de l'époque: le premier revêtu d'un habit de chanoine, est Marsile Ficin; le second, avec un ruban noir au cou, est Cristoforo Landino; le troisième est le Grec Demetrius Chalcondyle, et enfin le quatrième, qui lève un peu la main, est Ange Politien. En arrière d'eux, un groupe de trois hommes causent et représentent, dit-on, les plus fameux marchands de Florence, André de Médicis, Jean Ridolfi et Sassetti.
II.—La Visitation. A droite et à gauche de la Vierge et de sainte Élisabeth qui se rencontrent, l'assistance est formée par des groupes de Florentines de toute beauté. Elles sont coiffées et parées à la mode du temps; l'une d'elles, en robe jaune, à la suite de sainte Élisabeth vue de profil, est le portrait d'une des plus célèbres beautés d'alors, Ginevra di Benci.
III.—Naissance de Saint Jean-Baptiste. La disposition est analogue à celle de laNaissance de la Vierge. Derrière le lit de sainte Élisabeth, une servante lui présente une collation, tandis qu'au milieu de la fresque est assise la nourrice allaitant l'enfant et qu'à sa droite s'avance le groupe des amies, suivi d'une servante portant sur sa tête une corbeille où sont des pastèques et des raisins. Cette ample figure aux vêtements flottants semble, par sa beauté antique, échappée à quelque rêve païen.
IV.—Zacharie écrit le nom de Jean qu'il destine à son fils, sur une tablette que lui présente une femme a genoux.
V.—La prédication de Saint Jean-Baptiste.
VI.—Baptême de Jésus-Christ.
VII.—(Dans la lunette)Festin d'Hérodiade. Ces trois dernières fresques, presque entièrement effacées.
De chaque côté, au-dessus de la fenêtre garnie de vitraux noirs et brumeux, exécutés en 1492 sur les cartons du maître par ALESSANDRO FIORENTINO, la décoration à fresques se continue, mais en mauvaise préservation. Sur les deux côtés étroits de la fenêtre s'étagent des figures séparées dont les deux premières sont les portraits des donateurs de l'œuvre, Jean Tornabuoni et sa femme. Au-dessus de la fenêtre un grandCouronnement de la Viergepeut difficilement passer pour être de la main de Ghirlandajo.
La boiserie qui forme le dossier desstallesest un chef-d'œuvre de mosaïque sur bois. Faite à la fin du XVe siècle par BACCIO D'AGNOLO, on y voit les plus fines et les plus délicates arabesques; les stalles elles-mêmes sont gâtées par une malheureuse restauration de Vasari.
La Chapelle, à gauche du chœur, a été décorée d'un revêtement de marbre par JULES DE SANGALLO. Elle renferme le fameuxChristde BRUNELLESCHI exécuté pour un concours entre lui et Donatello.
La Chapelle Strozzi, placée en face de la chapelle Ruccellai, occupe le fond du transept à gauche. On y accède également par un double escalier. Ses trois murs sont décorés de fresques d'ORCAGNA, ouvrage le plus important qui existe, consacré au Jugement dernier d'après le Dante. Sur le mur de gauche,le Jugement dernier, et sur celui du fond,le Paradis, sont d'Andrea. Sur le mur de droite,l'Enferest de son frère NARDO ORCAGNA; c'est de beaucoup la moins bonne des fresques. La grande préoccupation du moyen âge, la vie future et les terreurs de l'au-delà , surgit tout entière dans un sujet que les artistes du temps affectionnaient tout particulièrement et dont ils cherchaient l'interprétation aussi bien dans les prophéties que dans l'Apocalypse. En effet, le terrible esprit de l'époque trouvait pleine matière à se développer, dans les vengeances et les châtiments d'un Jéhovah terrible, et nul thème ne pouvait exercer sur les esprits une plus étrange fascination; aussi, lorsque, poussé par cette attraction, Dante fut amené à composer son admirable poème, il répondait si exactement aux aspirations de ses contemporains, que les premiers «Cantica» à peine parus eurent sur l'art un retentissement énorme. Giotto fut le premier interprète du poète, et bientôt après, les Orcagna, chargés par les Strozzi de la décoration de leur chapelle, firent de son œuvre le thème de leurs compositions.
La muraille, peinte par Nardo, retrace tout le cycle du premier chant de l'Enfer; mais l'artiste, faute de place, ayant supprimé tous les épisodes gracieux, n'en laissa subsister que la tragique horreur. Le même motif le força à serrer tellement ses figures et à leur donner de si petites dimensions que ce défaut, aggravé par la mauvaise perspective d'alors et l'absence de tout savoir technique, le fit rester au-dessous du but qu'il s'était proposé.
La descente à l'Enfer commence dans la partie supérieure où les âmes dirigées sur les «sombres bords» sont attendues par Cerbère pour être conduites devant Pluton en train de festoyer.
Au-dessous, Caron, «le nocher funèbre», les conduit à travers l'Achéron à l'entrée du gouffre où le premier des cercles infernaux est peuplé par les prodigues et les avaricieux roulant leur éternel rocher.
Cette partie est séparée des cercles inférieurs, ceux des désespérés, par un mur crénelé, que lèchent les flammes, symbole du feu dévorant où sont consumées les âmes vouées au désespoir éternel.
On y voit les suicidés condamnés à s'entre-tuer toujours dans des bois sombres habités par les harpies, les parricides plongés jusqu'au cou dans un affreux lac de sang où ils sont éternellement rejetés par des centaures placés sur la rive qui les empêchent à coups de flèches de regagner le bord, les luxurieux brûlés par une pluie de feu; puis les cercles vont toujours en se rétrécissant et en s'obscurcissant davantage autour de ceux qu'ils enveloppent pour l'exécution de leurs terribles châtiments. Ils montrent les simoniaques la tête plongée dans le feu, les immondes la tête retournée, les voleurs en proie aux serpents, les fauteurs de scandale coupés en morceaux, les alchimistes et les faux monnayeurs s'entre-battant. Enfin, au centre de cette terrifiante composition, un démon colossal, debout dans une cuve remplie de serpents, dévore Judas, pendant que les traîtres, plongés dans la cuve et déchirés par les serpents, attendent semblable supplice.
Le Paradisd'André Orcagna, dont les extases font face à ces horreurs, est d'un art tout différent. Les belles figures qui composent la foule innombrable des élus tiennent le milieu entre l'art réaliste d'un Giotto et l'idéalisme d'un Angelico; c'est à ce dernier que sembleraient plutôt appartenir les deux admirables figures d'anges musiciens agenouillés sur des nuages aux pieds du Christ et de la Vierge.
Sur le mur du fond coupé par la fenêtre, Orcagna a peintle Jugement dernierauquel assistent des groupes d'hommes et de femmes et où, suivant l'esprit démocratique de l'époque, toutes les classes sociales sont confondues, l'empereur et le pape comme le mendiant.
Le retable sur fond d'or représente le Christ glorieux confiant d'une main à saint Pierre les clefs de l'Église, tandis que de l'autre il remet le livre de laSommeà saint Thomas d'Aquin présenté par la Vierge. Sur les volets du retable sont peints saint Michel et sainte Catherine, saint Laurent et saint Paul.
La Sacristie, ouverte à gauche sur le transept, contient un jolilavaboen terre vernissée, plaqué à l'intérieur de faïence; il a été exécuté en 1497 par JEAN DELLA ROBBIA.
Au bas de la chapelle Strozzi, une porte conduit à quelques marches descendant sur une galerie appelée leSepolcretodont les voûtes cintrées reposent sur des piliers octogonaux. Cette galerie a un grand intérêt par toutes les petites plaques commémoratives enchâssées dans le mur et dont la plupart portent en relief les écussons de presque toutes les nobles familles florentines. Une de ces plaques particulièrement belle est de Pisano et montre le donateur et la donatrice agenouillés aux pieds de la Vierge.
Le Sepolcreto débouche sur le cloître appelé aussi Cloître vert, de la couleur des fresques en camaïeu dont il est décoré.
Le Cloître vertest entouré d'une galerie formée d'arcs reposant sur des piliers octogonaux. Il a été peint par ANDREA ORCAGNA, pour les scènes de la Genèse, et par PAOLO UCCELLO, pourle Déluge,le Sacrificeetl'Ivresse de Noé, fresques en camaïeu vert sur fond rouge.
Les trois compositions d'Orcagna sont presque entièrement détruites, on y trouve pourtant encore quelques belles figures.
I.Création des animaux,Création de l'homme et de la femme,Adam et Ève mangent le fruit défendu.
II.Adam et Ève chassés du Paradis;Ève filant, ravissante figure de la Renaissance;Adam piochant. Dans le bas (détruit) étaientCaïn et Abel.
III.Mort de Caïnsous la flèche de Lameth,Noé construisant l'Arche,Noé faisant entrer les animaux dans l'Arche(détruit).
La fameuse fresque duDéluged'UCCELLO continue la série. Aucun artiste n'a poussé le fanatisme du réalisme plus loin qu'Uccello dont le nom, malgré l'extravagance bizarre de l'artiste, se rattache pourtant à des progrès techniques de premier ordre. Dans cette fresque peinte en 1446, tous les peintres purent venir apprendre le modelé et la perspective; mais, à côté de beautés de premier ordre, les grotesques inventions abondent. Les victimes expérimentent des appareils de sauvetage de toute sorte et plus ou moins saugrenus. L'un a placé autour de son cou une bouée; l'autre s'est réfugié dans une cuve; d'autres encore grimpent sur des échelles, nagent sur des planches, ou tentent de se sauver à cheval. L'arche colossale, dont on ne voit que la coque, occupe un côté entier, et Noé y apparaît.
Les autres fresques sont très détériorées; celle de l'Arche de Noé a pourtant conservé intact le groupe de ses trois fils, dont l'un, détaché de profil sur une treille, est une superbe et énergique figure.
Sur la droite du cloître s'ouvre la salle du chapitre appeléeChapelle des Espagnols, «Cappella degli Spagnuoli». Elle est éclairée par deux belles fenêtres ouvertes sur le cloître de chaque côté de la porte, dont les élégantes sculptures sont protégées par de belles grilles en fer à rinceaux découpés.
La chapelle, commencée en 1322, fut achevée en 1355 et magnifiquement décorée de fresques dont l'ensemble embrasse le cycle à peu près complet des croyances philosophiques, théologiques et religieuses du moyen âge. Ces peintures superbes et admirablement conservées sont attribuées par Vasari à TADDEO GADDI et à SIMONE MEMMI de Sienne. Le mur de droite par Simone Memmi représentel'Église militante et l'Église triomphante. Celui de gauche, par TADDEO GADDI, montrel'Église personnifiée par saint Thomas d'Aquindominant et protégeant toutes les connaissances humaines. Sur le mur du chevet coupé par l'enfoncement de l'autel est peint en forme d'éventaille Calvaire, avec d'un côtéle Chemin de Croixet de l'autrela Descente aux Limbes. Enfin les peintures de la voûte représentent des scènes de laVie de Jésus-Christ.
I.—L'Église militante et l'Église triomphante. Pendant que saint François prêchait une merveilleuse doctrine de charité et de tolérance, saint Dominique répandait sur le monde une foi sombre, ascétique et intolérante, car l'Église, pour lui, ne pouvait arriver au triomphe final que par l'emploi de moyens violents aussi bien contre les hérétiques que contre les fidèles.
Interprète de cette idée, le maître a symbolisé les deux grandes forces du moyen âge, l'Empereur et son Conseil, le Pape et son Concile assis devant l'église Sainte-Marie des Fleurs, personnifiant ici l'omnipotence de l'Église. Aux pieds du Pape sont couchées les brebis de la chrétienté gardées par les chiens noirs et blancs dominicains, «Domini canes», tandis que d'autres chiens poursuivent et mordent les loups hérétiques auxquels ils arrachent les brebis qu'ils tentent de ravir. En avant, à gauche, se tient le groupe des religieux et religieuses de tous les ordres, tandis qu'à droite sont les laïques, parmi lesquels on reconnaît les portraits célèbres de Pétrarque, de Boccace, de Giotto, de Cimabue et de Laure, devant lesquels sont agenouillés les pauvres et les infirmes. Sur la droite, la fresque est consacrée à l'application des théories dominicaines.
A.—Saint Dominique discute avec les hérétiques.
B.—Saint Dominique ayant convaincu les hérétiques, les fait se prosterner devant l'Évangile, tandis qu'un Archange déchire les livres hérésiarques.
C.—Au-dessus de ces sujets se trouve une rangée de petits personnages intermédiaires, dansant au son d'un tambour de basque, devant quatre personnages assis figurant des péchés mortels.
D.—Le haut de la composition est formé par un dominicain écoutant la confession d'un homme agenouillé, un second dominicain qui lui donne l'absolution au seuil du Paradis où l'introduit un troisième.
E.—Le Paradis occupe tout le haut de la fresque à gauche. D'après l'Apocalypse, le Christ y est représenté trônant sur l'arc-en-ciel entre deux anges; il est environné des Symboles des quatre Évangélistes, l'Agneau mystique est couché à ses pieds, et il tient d'une main l'Évangile, et de l'autre la clef du monde.
II.—Triomphe de saint Thomas d'Aquin. Le saint, les Évangiles à la main, trône en haut de la fresque; il écrase sous ses pieds Arius, Sabellius et Averroès, les trois grands hérésiarques.
A ses côtés sont assis, rangés l'un près de l'autre, les Évangélistes et les Prophètes alternant.
La partie inférieure est divisée en quatorze niches où trônent des figures de femmes, symbolisant toutes les connaissances de l'époque. Devant chacune d'elles est assis plus bas son principal adepte; toutes ces figures, d'une attitude un peu raide, ne varient guère que par l'expression des physionomies.
1°—Le droit civil et l'empereur Justinien.
2°—Le droit ecclésiastique et le pape Clément V.
3°—La théologie spéculative et Pietro Lombardo.
4°—La théologie pratique et Severino Boccio.
5°—La foi et saint Denis l'Aréopagite.
6°—L'Espérance et saint Jean Damascène.
7°—L'amour sacré et saint Augustin.
8°—L'arithmétique et Pythagore.
9°—La géométrie et Euclide.
10°—L'astronomie et Ptolémée.
11°—La musique et Tubalcaïn.
12°—La dialectique et Zénon d'Élée.
13°—La rhétorique et Cicéron.
14°—La grammaire avec Donato ou Priscien.
III.—Le Calvaire. La composition remplit un cintre divisé en trois parties dont le Calvaire occupe la plus haute. Le Portement de croix part du bas de la fresque, à gauche, pour monter au Calvaire. Dans le bas, à droite, est représentée la Descente de Jésus aux limbes, dont la porte s'écroule devant lui sur Satan. Cette partie, tout à fait remarquable, est peut-être la meilleure de la chapelle comme art et comme sentiment.
La fresque du mur d'entrée est en partie détruite: elle représentait, d'un côté, les prédications de saint Dominique; de l'autre, celles de saint Thomas d'Aquin, et au-dessous, des miracles opérés par les deux saints.
IV.—La voûte, divisée par les nervures en quatre parties angulaires, est occupée par des fresques symboliques.
I. Au-dessus de l'Église militante et triomphante,la Barque de Pierre, symbole des tempêtes qui peuvent assaillir l'Église, sans jamais la submerger.
II. Au-dessus du Calvaire,la Résurrection.
III. Au-dessus du triomphe de saint Thomas d'Aquin,la Pentecôte, symbole de toute science considérée comme don divin.
IV. Au-dessus de l'entrée,l'Ascension. Au delà du Cloître vert s'étend le Grand Cloître, aujourd'hui cour de l'École des Cadets.
La Pharmaciede l'ancien couvent, «la Spezeria» (Via della Scala), possède dans une petite pièce des fresques dures et heurtées de SPINELLO ARETINO,histoire de la Passion.
SAINT-JACQUES DE RIPOLI. Au tympan de la porte, bas-relief des DELLA ROBBIA.Le Christ entre Saint Thomas et un Saint.
A l'intérieur, l'église contient la meilleure œuvre de RIDOLFO GHIRLANDAJO, leMariage mystique de sainte Catherineexécuté vers 1505, sous la double influence de ses maîtres, Léonard et son père. La couleur admirable de ce tableau et sa tenue sobre et énergique l'ont fait longtemps attribuer au Vinci; c'est une œuvre de premier ordre.
ÉGLISE SAN FRANCESCO DE VANCHETONI(Via del Palazzuolo). Cette église conserve quelques ouvrages remarquables de DONATELLO. Deux admirablesbustes d'enfantssemblent être des portraits, tant leur originalité est puissante. L'un est un enfant à l'air triste et presque morose, tandis que l'autre, d'après la peau de chèvre de sa draperie, paraît être un Saint Jean-Baptiste adolescent.
L'ÉGLISE D'OGNISSANTI, édifiée en 1524, et remaniée en 1627, n'offre comme architecture rien d'intéressant. Dans le tympan de la porte principale, bas-relief de DELLA ROBBIA,le Couronnement de la Vierge.A l'intérieur, entre le troisième et le quatrième autel, sont deux fresques, œuvres de premier ordre: l'une de BOTTICELLI, l'autre de GHIRLANDAJO.
La fresque de BOTTICELLI, peinte en 1480, représenteSaint Jérôme; c'est un chef-d'œuvre autant par le fini précieux des détails que par l'anatomie puissante et large et par la profonde ferveur religieuse qui anime la figure du saint. Saint Jérôme, beau vieillard vêtu de la pourpre cardinalice, est assis devant une table, où il est accoudé et paraît réfléchir profondément. Ce qui est extraordinaire d'art minutieux, ce sont les multiples objets posés sur cette table; les pupitres à écrire et à lire, les parchemins, les livres, les lunettes, les ciseaux et jusqu'au tapis d'Orient qui la recouvre, tout dénote la précision et l'amour du détail, poussés à l'extrême.
LeSaint Augustinde Ghirlandajo a malheureusement pâli; il est également assis devant une table, l'aménagement peu compliqué de la pièce contraste fortement avec la fresque précédente. Le visage est admirable, et les mains surtout sont d'un modèle parfait.
La Sacristieest décorée d'une grande fresque, de l'école de Giotto,Christ en croixentouré d'anges, probablement une œuvre de FRANCESCO DA VOLTERRA (1350).
Au fond du transept, un escalier conduit à une chapelle où unChristde Giotto est un premier et timide essai d'anatomie dans ce sujet.
Dans l'ancien Réfectoiredu couvent ouvert sur le cloître, GHIRLANDAJO a peint en 1480la Cène. A cette époque, le maître avait accepté la décoration complète à fresque de l'église, mais le travail ne fut jamais exécuté et la fresque du réfectoire est la seule trace subsistant de ce projet dont elle était destinée à être le commencement. Ghirlandajo s'y montre en pleine possession de son beau talent; le dessin est large; les figures, bien composées, sont supérieures par l'élévation de la pensée, et il ne s'y trouve aucune trace de la sécheresse qu'on pourrait quelquefois reprocher à l'artiste.
Le ravissanttabernaclequi surmonte la porte d'entrée fut exécuté par AGOSTINO DI DUCCIO en 1463. Ce bijou est digne du meilleur et du plus cher élève de LUCA DELLA ROBBIA. Il a malheureusement été repeint.