LII

LIIOn était au lendemain de ces événements. Onze heures et demie venaient de sonner la minute exacte où, chaque jour, les six habituels personnages de ce monotone scénario se réunissaient dans le salon et s’y donnaient froidement le bonjour, avant de passer à table. La Marquise descendait toujours la première, et il n’y avait pas d’exemple qu’elle n’eût devancé les siens, à ce moment-là, dans la jolie chambre de cretonne fleurie. Aussi fut-ce un étonnement général, mêlé de quelque inquiétude, quand, plusieurs minutes aprèsl’heure ordinaire, la vieille Dame n’apparut point. On allait députer Berthe vers son aïeule, que tous supposaient retenue chez elle par quelque retardement, quand un cri terrible, suivi de la chute d’un corps, partit de la bibliothèque. Tous s’élancèrent. La douairière gisait, presque inanimée, au pied de l’échelle dont elle venait de choir. Trois volumes de l’Encyclopédie Larousse accablaient de leur poids sa frêle carcasse.Elle avoua, dans la suite, que, mordue à son tour par le démon de la citation, elle avait cherché de quoi l’alimenter, dans les tomes trop pesants qui déterminèrent sa dégringolade.Un épanchement de synovie se déclara, dont la blessée parut devoir ne se remettre jamais.

LIIOn était au lendemain de ces événements. Onze heures et demie venaient de sonner la minute exacte où, chaque jour, les six habituels personnages de ce monotone scénario se réunissaient dans le salon et s’y donnaient froidement le bonjour, avant de passer à table. La Marquise descendait toujours la première, et il n’y avait pas d’exemple qu’elle n’eût devancé les siens, à ce moment-là, dans la jolie chambre de cretonne fleurie. Aussi fut-ce un étonnement général, mêlé de quelque inquiétude, quand, plusieurs minutes aprèsl’heure ordinaire, la vieille Dame n’apparut point. On allait députer Berthe vers son aïeule, que tous supposaient retenue chez elle par quelque retardement, quand un cri terrible, suivi de la chute d’un corps, partit de la bibliothèque. Tous s’élancèrent. La douairière gisait, presque inanimée, au pied de l’échelle dont elle venait de choir. Trois volumes de l’Encyclopédie Larousse accablaient de leur poids sa frêle carcasse.Elle avoua, dans la suite, que, mordue à son tour par le démon de la citation, elle avait cherché de quoi l’alimenter, dans les tomes trop pesants qui déterminèrent sa dégringolade.Un épanchement de synovie se déclara, dont la blessée parut devoir ne se remettre jamais.

On était au lendemain de ces événements. Onze heures et demie venaient de sonner la minute exacte où, chaque jour, les six habituels personnages de ce monotone scénario se réunissaient dans le salon et s’y donnaient froidement le bonjour, avant de passer à table. La Marquise descendait toujours la première, et il n’y avait pas d’exemple qu’elle n’eût devancé les siens, à ce moment-là, dans la jolie chambre de cretonne fleurie. Aussi fut-ce un étonnement général, mêlé de quelque inquiétude, quand, plusieurs minutes aprèsl’heure ordinaire, la vieille Dame n’apparut point. On allait députer Berthe vers son aïeule, que tous supposaient retenue chez elle par quelque retardement, quand un cri terrible, suivi de la chute d’un corps, partit de la bibliothèque. Tous s’élancèrent. La douairière gisait, presque inanimée, au pied de l’échelle dont elle venait de choir. Trois volumes de l’Encyclopédie Larousse accablaient de leur poids sa frêle carcasse.

Elle avoua, dans la suite, que, mordue à son tour par le démon de la citation, elle avait cherché de quoi l’alimenter, dans les tomes trop pesants qui déterminèrent sa dégringolade.

Un épanchement de synovie se déclara, dont la blessée parut devoir ne se remettre jamais.


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