XINous avons examiné l’anatomie de Mademoiselle. De quoi tout cela était-il recouvert? De ce que la Marquise appelait drôlement, et non moins justement: desnippes. A savoir: de toilettes extrêmement nombreuses (l’Institutrice en changeait parfois des semaines de suite), sans que rien, dans leur contour ni leur couleur, fût jamais venu réjouir la rétine. Leur caractéristique était de n’en pas avoir, ni belles, ni laides, ni pauvres, ni riches, comme nées démodées. On aurait dit des effets de la Nature plus que des produits de l’Art et des applicationsde l’Industrie. Plutôt qu’avoir été tramé dans un atelier, ou ajusté sur un établi, cela semblait s’être chiffonné sous une coquille ou élancé hors d’une cosse.Il y en avait de toutes les formes et de tous les tons; des beiges, que l’Irlandaise mettait de préférence l’hiver; et de foncées, qu’elle revêtait durant la canicule. Car cette antithèse était de son goût. On la vit, une fois, descendre toute vêtue de blanc, un matin de janvier, pour s’assortir à la neige.Ce jour-là, les fillettes en profitèrent pour supplier leur Gouvernante de leur donner une représentation de ski. Elle eut le tort de céder. Son prestige en diminua, même aux yeux de l’acrimonieuse Henriette. Une croyance s’était presque établie qui, de temps à autre, faisait apparaître Mademoiselle comme une sorte de Séraphita Swedenborgiste,glissant sur d’invisibles névés, telle qu’un Ange Norvégien, en rupture de Ciel. Cette tradition s’infirma. On ne tint compte, ni de la bonne volonté, ni des conditions plus que défavorables, dérisoires, dans lesquelles la tentative s’était accomplie; ce fut un four... qui faillit se terminer par un tour de reins. Dans sa lutte disproportionnée entre le gel insuffisant et l’agilité des Scandes, la skieuse fut vaincue. Elle dut garder le lit avec une foulure. La médiocrité de l’accident ajoutait à sa confusion et au discrédit. La mort seule eût semblé à la hauteur des légendes.Une autre destinée de ces robes de Miss, ce n’était pas d’être usées, ni malpropres (bien qu’elles parussent faites depuis très longtemps, même quand on disait les porter pour la première fois), mais d’êtrefripées. Cela va de soi. Ellesprolongeaient leur existence sous des couvercles; et le fer ne les rencontrait point. Mademoiselle ne l’aurait pas manié; et, sans doute, à la suite d’expériences funestes où sa dignité s’était vue compromise, il lui répugnait de demander, à de fréquentes reprises, comme il aurait fallu, un service que, par ailleurs, on ne lui proposait pas.Il en résulte que, prié de donner votre avis sur les modes de Miss Winter, le plus sage parti eût été d’affirmer qu’elles avaient l’aird’avoir fait le tour du Monde.En outre, elles abondaient en boutons qui ne boutonnent rien, et en boutonnières qui ne s’ouvrent pas. Enfin, détail intime, Mademoiselle ne portait pas de chemise. On sut qu’elle faisait usage d’unecombinaison.
XINous avons examiné l’anatomie de Mademoiselle. De quoi tout cela était-il recouvert? De ce que la Marquise appelait drôlement, et non moins justement: desnippes. A savoir: de toilettes extrêmement nombreuses (l’Institutrice en changeait parfois des semaines de suite), sans que rien, dans leur contour ni leur couleur, fût jamais venu réjouir la rétine. Leur caractéristique était de n’en pas avoir, ni belles, ni laides, ni pauvres, ni riches, comme nées démodées. On aurait dit des effets de la Nature plus que des produits de l’Art et des applicationsde l’Industrie. Plutôt qu’avoir été tramé dans un atelier, ou ajusté sur un établi, cela semblait s’être chiffonné sous une coquille ou élancé hors d’une cosse.Il y en avait de toutes les formes et de tous les tons; des beiges, que l’Irlandaise mettait de préférence l’hiver; et de foncées, qu’elle revêtait durant la canicule. Car cette antithèse était de son goût. On la vit, une fois, descendre toute vêtue de blanc, un matin de janvier, pour s’assortir à la neige.Ce jour-là, les fillettes en profitèrent pour supplier leur Gouvernante de leur donner une représentation de ski. Elle eut le tort de céder. Son prestige en diminua, même aux yeux de l’acrimonieuse Henriette. Une croyance s’était presque établie qui, de temps à autre, faisait apparaître Mademoiselle comme une sorte de Séraphita Swedenborgiste,glissant sur d’invisibles névés, telle qu’un Ange Norvégien, en rupture de Ciel. Cette tradition s’infirma. On ne tint compte, ni de la bonne volonté, ni des conditions plus que défavorables, dérisoires, dans lesquelles la tentative s’était accomplie; ce fut un four... qui faillit se terminer par un tour de reins. Dans sa lutte disproportionnée entre le gel insuffisant et l’agilité des Scandes, la skieuse fut vaincue. Elle dut garder le lit avec une foulure. La médiocrité de l’accident ajoutait à sa confusion et au discrédit. La mort seule eût semblé à la hauteur des légendes.Une autre destinée de ces robes de Miss, ce n’était pas d’être usées, ni malpropres (bien qu’elles parussent faites depuis très longtemps, même quand on disait les porter pour la première fois), mais d’êtrefripées. Cela va de soi. Ellesprolongeaient leur existence sous des couvercles; et le fer ne les rencontrait point. Mademoiselle ne l’aurait pas manié; et, sans doute, à la suite d’expériences funestes où sa dignité s’était vue compromise, il lui répugnait de demander, à de fréquentes reprises, comme il aurait fallu, un service que, par ailleurs, on ne lui proposait pas.Il en résulte que, prié de donner votre avis sur les modes de Miss Winter, le plus sage parti eût été d’affirmer qu’elles avaient l’aird’avoir fait le tour du Monde.En outre, elles abondaient en boutons qui ne boutonnent rien, et en boutonnières qui ne s’ouvrent pas. Enfin, détail intime, Mademoiselle ne portait pas de chemise. On sut qu’elle faisait usage d’unecombinaison.
Nous avons examiné l’anatomie de Mademoiselle. De quoi tout cela était-il recouvert? De ce que la Marquise appelait drôlement, et non moins justement: desnippes. A savoir: de toilettes extrêmement nombreuses (l’Institutrice en changeait parfois des semaines de suite), sans que rien, dans leur contour ni leur couleur, fût jamais venu réjouir la rétine. Leur caractéristique était de n’en pas avoir, ni belles, ni laides, ni pauvres, ni riches, comme nées démodées. On aurait dit des effets de la Nature plus que des produits de l’Art et des applicationsde l’Industrie. Plutôt qu’avoir été tramé dans un atelier, ou ajusté sur un établi, cela semblait s’être chiffonné sous une coquille ou élancé hors d’une cosse.
Il y en avait de toutes les formes et de tous les tons; des beiges, que l’Irlandaise mettait de préférence l’hiver; et de foncées, qu’elle revêtait durant la canicule. Car cette antithèse était de son goût. On la vit, une fois, descendre toute vêtue de blanc, un matin de janvier, pour s’assortir à la neige.
Ce jour-là, les fillettes en profitèrent pour supplier leur Gouvernante de leur donner une représentation de ski. Elle eut le tort de céder. Son prestige en diminua, même aux yeux de l’acrimonieuse Henriette. Une croyance s’était presque établie qui, de temps à autre, faisait apparaître Mademoiselle comme une sorte de Séraphita Swedenborgiste,glissant sur d’invisibles névés, telle qu’un Ange Norvégien, en rupture de Ciel. Cette tradition s’infirma. On ne tint compte, ni de la bonne volonté, ni des conditions plus que défavorables, dérisoires, dans lesquelles la tentative s’était accomplie; ce fut un four... qui faillit se terminer par un tour de reins. Dans sa lutte disproportionnée entre le gel insuffisant et l’agilité des Scandes, la skieuse fut vaincue. Elle dut garder le lit avec une foulure. La médiocrité de l’accident ajoutait à sa confusion et au discrédit. La mort seule eût semblé à la hauteur des légendes.
Une autre destinée de ces robes de Miss, ce n’était pas d’être usées, ni malpropres (bien qu’elles parussent faites depuis très longtemps, même quand on disait les porter pour la première fois), mais d’êtrefripées. Cela va de soi. Ellesprolongeaient leur existence sous des couvercles; et le fer ne les rencontrait point. Mademoiselle ne l’aurait pas manié; et, sans doute, à la suite d’expériences funestes où sa dignité s’était vue compromise, il lui répugnait de demander, à de fréquentes reprises, comme il aurait fallu, un service que, par ailleurs, on ne lui proposait pas.
Il en résulte que, prié de donner votre avis sur les modes de Miss Winter, le plus sage parti eût été d’affirmer qu’elles avaient l’aird’avoir fait le tour du Monde.
En outre, elles abondaient en boutons qui ne boutonnent rien, et en boutonnières qui ne s’ouvrent pas. Enfin, détail intime, Mademoiselle ne portait pas de chemise. On sut qu’elle faisait usage d’unecombinaison.